Photomontage Sarkofrance
Les députés planchent sur la loi de financement de la sécurité sociale. Nicolas est revenu de ses vacances marocaines avec Carla pour filer ensuite à Bruxelles. Une vague de nominations complaisantes a été promulguée mercredi au Conseil économique et social. Et le bouclier fiscal comme l'ISF sont jugés discriminatoires à l'égard des contribuables français résident à l'étranger par la Commission européenne... De qui se moque-t-on ?Sarkozy, du Maroc à Bruxelles
Où était passé Nicolas Sarkozy cette semaine ? Au Maroc, pour un weekend prolongé qui débuta samedi après-midi et se prolongea jusqu'à mardi, avec Carla Bruni, dans une résidence prêtée par le souverain local. L'actualité française était-elle à ce point calme et sans intérêt ? Nicolas Sarkozy n'en avait cure. Il a l'habitude, depuis son élection en mai 2007, de multiplier les escapades privées, quitte à partir au pire moment. Cette fois-ci, il préféra se dorer quelques jours au soleil, en pleine semaine sociale et de vote de la réforme des retraites.
De retour à Paris pour son conseil des ministres mercredi matin, il a pu valider un projet de nouvelle réglementation thermique des constructions neuves, issue de la loi Grenelle 2 votée en juillet dernier. Le texte est excessivement prudent : affichant de louables objectifs d'amélioration de l'isolation thermique de l'habitat, il ne prévoit ses nouvelles normes que pour le 28 octobre 2011 pour les bâtiments neufs des secteurs tertiaire et public et pour les rénovations urbaines gérées par l'ANRU, et , et le 1er janvier 2013 pour les autres (sic !). En d'autres termes, on peut encore perdre 3 ans... La secrétaire d'Etat à l'écologie Chantal Jouanno a promis que « le gain de pouvoir d’achat grâce aux économies d’énergie réalisées sur 20 ans est estimé entre 5 000 euros en immeuble collectif et 15 000 euros en maison individuelle.» Mais l'attention, dès jeudi, était encore sur la contestation sociale. la journée du 28 octobre a rempli ses objectifs : la mobilisation était attendue moins forte pour cause de vacances de Toussaint, mais elle fut réelle : entre 560 000 (selon la police) et 2 millions (selon les syndicats). La quasi-totalité des médias ont cependant relayé le message officiel d'une contestation qui s'essoufflerait. Le ministère de l'intérieur s'est empressé de crier sobrement victoire, évoquant « la plus faible participation depuis le début des journées de mobilisation en juin. » A l'Elysée, Nicolas Sarkozy recevait, aux frais du contribuable, des « responsables de la majorité ». Il les a prévenu qu'il ne « fallait pas agresser les syndicats ».
La polémique sur le bouclier fiscal et l'iSF, elle, a repris... à Bruxelles. La Commission européenne a menacé le gouvernement français d'une procédure de sanctions d'ici deux mois si la France ne revoit pas ces deux dispositifs. Pour le bouclier fiscal, la Commission demande à la France de comptabiliser les impôts payés ailleurs en Europe dans le dispositif, ce qui reviendrait à faire rembourser par les contribuables français une partie des impôts payés par certains évadés. Pour l'ISF, la Commission critique le fait que son plafonnement (fixé à 85% des revenus nets imposables du foyer fiscal en ajoutant ISF et impôt sur le revenu) ne tienne pas compte du patrimoine détenu à l'étranger par certains de ces contribuables : « l'application de ce plafonnement contrevient au droit européen de la même manière que le bouclier fiscal, dans la mesure où le plafonnement ne s'applique qu'aux personnes domiciliées en France » justifient les services de José-Manuel Barroso.
En d'autres termes, Bruxelles considère que le bouclier comme l'ISF sont discriminatoires à l'encontre des ... évadés fiscaux ! On croit rêver... Christine Lagarde, jeudi sur France Inter, a annoncé que la France déposerait un recours contre cette action européenne. Un peu plus tard sur LCI, François Baroin a expliqué que cet avis européen ne « changeait rien à l'affaire.» Une chose est sûre : la Commission a finalement rendu un fier service à Nicolas Sarkozy. La remise en cause du bouclier fiscal ET de l'ISF est accélérée...
Jeudi, le président français partait à Bruxelles, pour un conseil des chefs d'Etats qui s'annonce donc riche en remous.
Pantouflages en cascade
La réforme des retraites votée, Raymond Soubie, le conseiller social de Nicolas Sarkozy peut partir tranquille. Dimanche dernier, il expliquait qu'il quitterait l'Elysée prochainement, et reprendrait son métier d'entrepreneur, grâce, notamment, à une fortune personnelle accumulée avant son entrée à l'Elysée. Mercredi, on apprenait qu'il était nommé au Conseil Economique et Social (CES), une promotion validée en conseil des ministres. Quel symbole de l'entrepreneuriat ! Du vrai pantouflage, retraite en sus, pour l'un des proches du président français ! Quelle leçon ! Rappelons que les membres du CES sont rémunérés par la République, à raison d'un tiers d'une indemnité parlementaire, frais de résidence compris, plus une « indemnité spéciale pour frais de représentation », soit plus de 5 000 euros nets mensuels...
« Art. premier. Les membres du Conseil économique et social reçoivent une rémunération égale au tiers de l'indemnité parlementaire telle qu'elle est définie par l'article premier de l'ordonnance du 13 décembre 1958 susvisée et comprenant également l’indemnité de résidence mentionnée à l’article 20 de la loi du 13 juillet 1983. A cette rémunération s’ajoute éventuellement le supplément familial de traitement, pour les conseillers ayant des enfants à charge et qui ne perçoivent pas celui-ci par ailleurs.»Raymond Soubie n'est pas seul à rejoindre le CES. La promotion du 27 octobre comprend également nombre de proches du camp présidentiel ou diverses personnalités dont il s'agit sans doute de concilier les faveurs :
Source : Décret n° 59-602 du 5 mai 1959 relatif à la rémunération et aux indemnités des membres du Conseil économique et social modifié par le décret n° 76-686 du 20 juillet 1976, le décret n° 80-827 du 15 octobre 1980, le décret n° 2001-158 du 19 février 2001 et le décret 2007-277 du 1er mars 2007
- Pierre Charon, autre conseiller de Nicolas Sarkozy qu'on ne présente plus,
- la navigatrice Maud Fontenoy,
- le producteur Alain Terzian, proche de Sarkozy
- l'adjoint au maire de Vichy UMP Christian Corne,
- Jean-Marie Geveaux, ancien député UMP du Mans battu en 2007,
- Yves Urieta, ancien maire socialiste de Pau passé sarkozyste à la Gauche Moderne de Jean-Marie Bockel,
- la présidente du mouvement patronal Ethic Sophie de Menthon,
- l'UMP Guillaume de Russé, président du Futuroscope,
- le sénateur UMP Jean-Claude Etienne, dont le mandat expire en septembre prochain,
- l'ex-épouse d'Eric Besson Sylvie Brunet,
- Claire Gibault, conseillère municipale UMP à Paris,
- Gisèle Ballaloud, conseillère municipale UMP d'Annecy,
- Nadia El Okki, 1ère adjointe UMP au maire de Saint-Martin-de-Valgognes,
- Guillaume de Russe, conseiller général UMP de Montmorillon,
- Hervé Marseille, maire-conseiller général NC de Meudon,
- Hugues Martin, 68 ans, ancien député-maire UMP de Bordeaux,
- Ange Santini, 51 ans, UMP, maire de Calvi, ancien président du conseil exécutif de Corse de 2004 à 2010.
Depuis des mois, le CES ne siège plus dans l'attente de 63 nominations, actées donc en conseil des ministres mercredi 27 octobre. Sur ces 63 nominations, Nicolas Sarkozy en a choisi ... 40.
La lecture de cette liste des heureux promus peut donner la nausée.
Vive l'opacité et le cumul
La semaine dernière, les députés UMP ont coup sur coup rejeté comme un seul homme trois propositions de lois visant à prévenir les conflits d'intérêts des parlementaires. Nous avions déjà évoqué le projet d'amendement constitutionnel « pour une République décente », qui visait à créer l'obligation de légiférer sur le cumul d’une fonction ministérielle avec des responsabilités au sein d’un parti politique. Cet loi a été rejetée. En parallèle, deux autres textes ont subi le même sort sur lesquels les médias se sont peu attardés.
L'un renforçait la transparence financière de la vie politique : limitation des dons consentis par les personnes physiques à 7 500 euros pour un ou plusieurs partis politiques (article 1er), assimilation des cotisations versées en qualité d'adhérent d'un parti politique aux dons visés par l'article 1er (article 2), et obligation « pour les associations de financement et les mandataires financiers de rendre publique la liste des personnes ayant consenti des dons de plus de 3 000 euros.» L'autre interdisait le cumul du mandat de parlementaire avec l’exercice d’une fonction exécutive locale. On savait que Nicolas Sarkozy, et donc son gouvernement, étaient hostiles à l'interdiction du cumul des mandats. La République version Sarkofrance doit être constituée de notables politiques professionnels peu nombreux qui, tels des surhommes, cumulent mandats et fonctions privées, postes locaux et nationaux. « La possibilité, offerte par notre démocratie, de cumuler un mandat parlementaire et un mandat local, n’est pas un hasard et encore moins une anomalie. » a expliqué le ministre Raincourt en charge des relations avec le Parlement. « Cette possibilité s’explique par notre tradition politique et par la volonté de nos concitoyens d’être représentés par des parlementaires proches d’eux, conscients de leurs problèmes et attentifs à leurs préoccupations – même si l’on constate, grâce aux enquêtes d’opinion, que nos concitoyens peuvent parfois exprimer des désirs contradictoires. »
Concernant la transparence des financements des partis politiques, les arguments défendus, la semaine dernière, par les soutiens du gouvernement furent plus étranges. Primo, il faudrait attendre une « grande » loi, promise pour le premier semestre prochain. Secundo, il n'y aurait pas d'urgence à légiférer car gauche et droite toucheraient à peu près la même somme de donateurs privés (7,5 millions d'euros pour chaque camp en 2009 d'après Raincourt).... De qui se moque-t-on ?
Lors de sa campagne de 2007 Sarkozy avait pourtant promis de « remplacer l’opacité par la transparence », une promesse bien vite oubliée.
Ami sarkozyste, où es-tu ?