Depuis de nombreux mois les journaux télévisés, les unes de presse, la rue, sont presque en permanence occupés par le thème, à tel point qu’une certaine lassitude pointe le nez. Il n’est pas rare de croiser un voisin, un ami, qui vous déclarera sans ambages : « il y en a un peu marre … »
Traces bénéfiques sans doute, celles qui concernent le relatif consensus ne remettant pas en cause la nécessité de la réforme. Même si les divergences sur les modalités furent tranchées et souvent acerbes, il est notable que personne ou presque ne remet en cause cette nécessité réformatrice. Il serait possible pourtant de la nier : trop contingente d’un moment de crise, trop éloignée surtout d’une question de fond, la répartition des gains de productivité entre le capital et les salaires sous toutes les formes et la retraite en est une.
Les syndicats ont plutôt bien géré cet épisode important pour eux. Il est certain que le numéro de duettiste Chérèque, Thibault a été performant et sans fausses notes. Il y a là un changement notable, se révèlant efficace, mobilisateur et certainement apprécié par les salariés. La seule question réside dans la pérennité d’une telle attitude, car cette trace positive peut très rapidement s’effacer sous l’effet de l’esprit “boutique”
Sur les équilibres politiques, c’était de cette trace-là dont parlait le commentateur, l’interprétation est beaucoup plus délicate et difficile à cerner. Le premier réflexe est bien sûr d’attribuer des pénalités au porteur d’une réforme controversée et des points positifs à ceux qui ont mené la bataille d’opposition. Les choses sont peut-être un peu plus compliquées. Il apparaît évident que le PS ne tire pas les bénéfices attendus de son attitude. Les hésitations ont été trop visibles, parfois des cacophonies certes vite étouffées, surtout la perception qu’une véritable alternative n’était pas proposée. Pour les plus radicaux, le discours Besancenot et Mélenchon restera plus audible et clair même s’il ne répond pas à une cohérence libérale et européenne. Justement niant ces réalités contestées, il prend plus de vigueur dans une frange de l’opinion plus importante que le pensent les cénacles. Enfin, l’exécutif peut aussi titrer quelques bénéfices de son opiniâtreté et de sa fermeté. Rien n’eut été pire pour lui qu’un recul trop important, une débâcle en rase campagne. Les choses ne sont pas terminées, dites-vous, certes mais elles sont bien engagées et il est certain qu’à droite, cette fermeté sera comptabilisée.
Traces économiques enfin, elles peuvent vite s’effacer mais elles sont réelles même en mettant de côté les réticences grandissantes des investisseurs étrangers douchés par nos pratiques sociales radicales; le port de Marseille par exemple se rapproche tous les jours un peu plus du simple port de plaisance dans lequel les dockers n’auront plus raison d’être, les grands flux de marchandises l’évitant pour Barcelonne ou Anvers. Cette comptabilité-là reste à faire : elle est préoccupante.