Cette après-midi, l'Assemblée nationale a adopté par 336 voix contre 233 le projet de loi réformant les retraites, mettant ainsi fin aux débats parlementaires. Le PS a aussitôt annoncé son intention de saisir le Conseil constitutionnel. Il faudra donc probablement attendre la mi-novembre pour que la loi puisse être promulguée.
Il n'a échappé à personne que, depuis plusieurs mois, l'Elysée, les membres du gouvernement, Woerth en tête, les parlementaires UMP, de nombreux éditorialistes n'ont cessé de nous expliquer que, pour des raisons démographiques (ah bon, seulement !?), il n'était plus possible de financer les retraites par répartition.
Par ailleurs, des ingénieurs, des syndicalistes, des artisans, des agriculteurs, des commerçants, des ouvriers, des économistes, des étudiants, des lycéens ont fait un calcul simple faisant apparaître qu’il ne serait pas très difficile de financer les retraites par répartition, même dans 40 ans. Même Xavier Bertrand en a (furtivement !), été troublé ! C'est cette démonstration simple, élaborée par "Retraites-Enjeux-Débats" (merci Guy pour le lien !), que je vous propose d'étudier maintenant...
Petite arithmétique des retraites … cherchez l’erreur !
Le Président de la République, les membres du gouvernement, les parlementaires UMP et pas mal d’éditorialistes ne cessent de nous expliquer que, pour des raisons démographiques, il ne sera bientôt plus possible de financer les retraites par répartition. De l’autre côté : des ingénieurs, des syndicalistes, des artisans, des agriculteurs, des commerçants, des ouvriers, des économistes, des étudiants, des lycéens ont fait un calcul simple faisant apparaître qu’il ne serait pas très difficile de financer les retraites par répartition, même dans 40 ans.
Ils sont partis des données incontestables suivantes :
· au cours des 40 dernières années, avec une croissance annuelle moyenne de 2%, le PIB est passé de 1000 à 2000 milliards d’euros
· au cours des 40 ans prochaines années, le nombre de personnes de plus de 60 ans va en gros doubler. En 2010, pour 10 personnes « entre 20 et 60 ans » il y a 4 personnes de « plus de 60 ans ». En 2050, pour 10 personnes « entre 20 et 60 ans » il y aura 8 personnes de « plus de 60 ans »
· dans l’hypothèse basse où, sur les 40 prochaines années, la croissance serait seulement de 1% en moyenne annuelle (le gouvernement promet 2% et plus, afin de faire reculer le chômage), le PIB passera de 2000 milliards en 2010 à 3000 milliards en 2050
· la part des salaires, y compris les retraites, représente aujourd’hui en gros 60% du PIB. Plaçons nous dans l’hypothèse où l’on ne toucherait pas à la part des profits. C’est donc 60% du PIB que doivent se partager les « actifs » et les retraités. Donc 1 200 milliards en 2010 et 1 800 milliards en 2050. En signalant au passage, comme le fait remarquer pertinemment Bernard Friot, qu’un retraité qui cultive son potager produit plus de richesses que le consultant en communication d’un Président de la République.
Convenons que les 1 200 milliards sont représentés par un gâteau de 1 200 grammes et les 1 800 milliards par un gâteau de 1 800 grammes. Le problème d’arithmétique est donc le suivant :
« En 2010, dix salariés produisent un gâteau de 1 200 grammes, à partager avec 4 retraités, donc entre 14 personnes. En 2050, dix salariés produiront au minimum un gâteau de 1 800 grammes à partager avec 8 retraités, donc entre 18 personnes. Calculons le poids de la part de gâteau de chaque personne, en 2010 et en 2050. Puis regardons si la part de chacun en 2050 sera ou non plus petite qu’en 2010 ? »
Le calcul donne les résultats suivants :
· en 2010, la part de chacun est de 86 g (1 200 : 14) · en 2050, la part de chacun sera de 100 g (1 800 : 18) · en 2050 la part de chacun n’aura pas baissé. Elle aura même augmenté de 17% par rapport à 2010
Profitant d’un débat « Quel avenir pour les retraites ? », entre Xavier Bertrand et Bernard Thibault à Lyon le 25 septembre 2010, nous avons demandé à Xavier Bertrand si nos calculs étaient justes ou erronés. Le secrétaire général de l’UMP a reconnu que les résultats étaient justes, mais que l’énoncé du problème aurait du préciser que dans les 40 années à venir une partie de l’accroissement des richesses devra être consacrée à l’augmentation des dépenses de santé et à celles liées à la dépendance (le 5ème risque). L’augmentation de ces deux types de dépenses correspond à une augmentation du bien être, donc de la « richesse » ou qualité de vie. Nous pensons qu’il n’y a donc pas de raison de diminuer d’autant le gâteau à partager. Nous avons néanmoins, par curiosité, refait nos modestes calculs en réservant sur le gâteau de 2050 : 100 milliards de plus pour la santé et 100 milliards pour la dépendance. Donc, comme si le gâteau de 2050 ne pesait plus que 1 600 grammes. Résultats du nouveau calcul :
· en 2010, la part de chacun est toujours de 86 g (1 200 : 14) · en 2050, la part de chacun n’est plus que 89 g (1 600 : 18) · en 2050 la part de chacun n’aura donc toujours pas baissé
Cette arithmétique toute simple montre que notre système de retraites par répartition, que le monde entier nous envie, est tout à fait finançable à l’horizon 2050. De plus, contrairement aux systèmes d’épargne retraite par capitalisation, la répartition ne vient pas alimenter la financiarisation déjà très excessive du système économique.
C’est pour ne pas alourdir la démonstration que nous avons laissé de côté d’autres aspects qui permettraient de faire grossir le gâteau d’ici 2050, tels que notamment :
· récupérer une partie significative des revenus de la propriété lucrative (10% du PIB), ce qui est non seulement possible, mais indispensable pour l’intérêt général (cf B. Friot et d’autres)
· la part des richesses non marchandes, puisqu’elles ne sont pas comptabilisées dans le PIB
· les richesses supplémentaires qui pourraient être produites par les 4 à 5 millions de demandeurs de … travail et de salaire
11 octobre 2010
andré martin (ingénieur - animateur du site http://www.retraites-enjeux-debats.org/
Toute reproduction et diffusion est ... vivement encouragée