Le voyageur
Voir n’est point commun. La vision est la conquête de la vie.
On voit toujours, plus ou moins, comme on est.
Le monde est plein d’aveugles aux yeux ouverts sous une taie, en tout spectacle, c’est la cornée qu’ils contemplent et leur taie grise qu’ils saisissent...
Un homme voyage pour sentir et pour vivre. À mesure qu’il voit du pays, c’est lui-même qui vaut mieux la peine d’être vu.
Il se fait chaque jour plus riche de tout ce qu’il découvre. Voilà pourquoi le voyage est si beau quand on l’a derrière soi.
Il n’est plus et l’on demeure.
André Suarès. (Le voyage du Condottière).