Giedré : " Je ne prétend à rien, à aucun but"

A Toulouse pour un concert au Bikini, enfin une première partie, la révélation de la chanson française Giedré nous a accordé une interview.

Il y a chez certaines personnes, un ton sidérant qui font leur charme. D'autres au bords des lèvres se murmurent des phrases d'une étrange dureté. Des bouffés de fumée quotidienne. Loin des banalités. Sous des trais fins et séduisants, se cache une personne attachante. Laurent Baffie est, lui même, choqué lors de ses passages sur l'antenne d'Europe 1. Dans ses chansons, Giedré sort des absurdités crues ou encore des réalités dures. Ne gardant rarement sa langue dans sa poche, la chanteuse dévie souvent du chemin banalisé des questions-réponses. Un bonheur. Éprouvant pour la psychologie journalistique. Si, ici, on peut en parler. On aura essayé d'avoir une rencontre sérieuse mais avec cette fille là, rien n'est possible. Tout devient impossible. Jouissif aussi. Le phénomène finit son plat d'huitre, se pose devant moi, et, après quelques banalités d'usage, la rencontre commence sans pour autant être banale. " Je m'allume une clope, ça te dérange pas?"

Pas de problème, alors comment vas tu?
Ben, comme tu le vois, je suis en forme. Je déguste de sublimes huitres. Et, un petit vin.

C'est ta première fois à Toulouse ?
En concert et dans la vie réelle, oui. C'est assez frustrant car je descend de l'avion et je repars demain. Donc, je n'ai pas le temps de me balader ou de sortir.

Dans tes chansons tu rentres dans le vif du sujet, parlant des handicapés, des nains, de la sodomie et j'en passe. Certains jugent ton humour, ton univers, assez corrosif. D'accord avec eux?
Ce n'est pas corrosif, ce n'est pas vrai. Les artistes décrivent le monde tel qu'ils le voient. Moi, je dépeins ce que j'observe en ouvrant ma fenêtre. Si, certains voient des papillons et des cœurs volant partout, tant mieux pour eux. Pas moi. Et, je ne pense pas être allumé pour autant.

Je ne l'ai pas encore dis d'ailleurs.
Je sentais que t'aillais y venir. Ce que je ressens, je l'écris. Ce n'est pas pour déranger que je monte sur scène. Encore, une fois, si t'ouvre la fenêtre tu verras la même chose que moi.

Évidemment. Autant, faut-il le dire.
Carrément, la bonne conscience est pour les feignants.

Comment es-tu devenue chanteuse? Pour quelles raisons ?
L'appât du gain, évidemment. C'est la seule gloire. Et, c'est pas tout. Pour la coke, la gloire et les putes. J'adore les paillettes. Je vais jouer la carte de l'honnêteté : je rêve de Saint Tropez et des soirées avec Maximo Gargia. Un grand et gros Môssieur.

En gros, le triptyque rock absolue. Mais, sur scène t'es seule avec ta guitare, pas trop dur?
La guitare est juste un bouclier. Je m'en sert pour parer les lancer de tomates et autres jets de cannettes. J'espère que le Bikini a mis en place un plan vigi-pirate pour mon concert ce soir car je ne souhaite pas être amochée.

Ce serait assez bête car t'es assez mignonne.
Merci, tu sens, il se passe un truc entre nous?

Pas du tout, mais continuons. Si je te suis, la guitare, tu la gratte donc pas. Les cordes te servent à rien?
Tu rigoles. Comme tu as pu l'écouter, je suis une experte en guitare. Je suis un peu le Jimi Hendrix français avec un peu de Django Reihnart. Mais, petite confidence, ils ne m'arrivent pas au talon.

On le sens dans tes influences d'ailleurs. Je dirais que t'es un peu une Georges Brassens sans moustache ou une Linda Lemay sans la voix agaçante.
(Giedré rigole, puis reprend son ton calme et serein). Je suis plus influencé par le compositeur d'AB production. C'est un peu ma génération.

Le Club Dorothée?
Oui ! J'avais ma carte de membre et je rêvais de rencontrer Monsieur Cadeau. D'ailleurs, le jour de mon anniversaire, au moment où le nom des membres apparaissait au générique, je n'ai pas vu le mien. J'en ai pleuré. Petit aparté, tu pourras mettre dans ton article des sous-titres tu genre, elle pleure ou elle rit.

Bien sûr, mais je ne sais pas sur quel pied danser.
Je te le dirais. Sinon, oui, c'était le club Dorothée. J'ai fait ce métier que pour rencontrer Monsieur Cadeau.

Il n'est pas mort ?
Non. C'est René des Musclé (elle pleure). Tu sais, "Salut les musclé" (Elle entonne l'air). Ne met pas trop de parenthèse tout de même dans l'article.

Je vais essayé. Dans une des chansons, tu rêves de pisser debout. Pourquoi?
C'est évident. C'est plus pratique. Quand t'es accroupis, tu t'en met plein les pieds, plein les chaussures.

Pourtant, entre deux voitures, surveiller par une amie, il y a la beauté du jeu.
Ah non, c'est faux. C'est dégradant. J'essaye debout dorénavant, mais je ne préfère pas en parler. C'est des souvenirs assez douloureux.

Dans une de tes chassons, les Questions, tu t'en poses des milliers !
Il y a des choses étonnantes dans la vie. Je me pose trop de questions avec ma grande humilité.

C'est le genre de chanson à énumération parfaite. Tu as enfin trouvé des réponses ?
Déjà je réponds à tes questions, excellentes, mais sinon non. Je n'ai pas de réponse, peut être si j'en obtiens je composerai. J'aime les chansons à énumérations, pouvoir changer des phrases, en rajouter, jauger le public.

C'est un peu facile les chansons à énumérations, non?
Tu sais je me remets souvent en question. Je suis quand même un mythe, une vedette ou une légende. Choisit ! Ça fait quoi d'interviewer quelqu'un d'aussi connu? C'est mieux qu'Higelin, hein?

Pas grand chose à vrai dire.
(Elle rigole de nouveau). Beaucoup pense que je suis folle, je suis bien placé pour dire que non.

Comment se passe ta création artistique ?
J'écris tout le temps. Je ne m'impose pas de période d'écriture. C'est tout le temps, à chaque moment, euh, dans mon sommeil. Je me lève et j'écris. Une idée, un texte et je compose.

Tu parles souvent du quotidien jamais de politique. Les politiciens sont assez drôle comme ça ?
Bien sûr. Je n'ai rien à dire à ce sujet là. Ce n'est pas mon rôle. D'autres le font mieux que moi, je crois.

Tu te définis comme une chanteuse ou une humoriste.
Je hais le terme d'humoriste. Je ne le suis pas. Tu peux dire que je suis une danseuse à claquette qui mange de la salade de riz. "Le rire n'est pas un but, c'est un moyen". Mets que c'est de moi. Et, puis si personne n'aime, c'est que le public n'a rien compris.

Dans tes projets multiples, il y a un album ?
L'album est en préparation. Je dois prendre des décisions pour une sortie bientôt. L'objet de l'album doit changer, je souhaite le mien vivant. Et puis, ce sont les gens qui m'ont faite. C'est donc une énorme responsabilité. Je veux que cet album soit le leur. Je ne souhaite pas développer, mais ce sera quelque chose d'unique.

Ce soir, c'est la scène. Toujours un peu craintive avant le début du set ?
Je flippe toujours un petit peu. Là encore, j'ai une énorme responsabilité vis à vis du public. Mais je ne suis pas toute seule non plus. Je parle beaucoup au public. J'espère que mes chansons ne font pas que parler.

Bon, je vois que tout va bien pour toi. Une émission avec Baffie, sur Europe 1...
Baffie pense que je suis folle. Il est bien placé pour parler.

...et un projet sur Comédie. Tu m'en parles un peu.
Sur Comédie, j'ai enregistré des émissions pour le mois de décembre. En tout, quatre. Je ne prétends encore une fois à rien, je n'ai pas de but.

Donc, la démarche vient de la production.
Oui, j'ai reçu un mail, haute technologie oblige, pour faire un talkshow subversif. Je n'y chante qu'une chanson par émission.

Tu prends plus ton pied sur scène, j'ai l'impression.
Si je dois choisir, ce serait la scène. Et phrase très intelligente, et très française: "Ce que je peux c'est ça."

Une dernière gorgée. Giedré se lève pour retourner en loge, "telle une star". Elle se retourne une dernière fois "J'espère que tu viendras ce soir me voir". Je ne sais pourquoi, cette idée là me ravit. Le soir même, le Bikini affiche complet. Et, Giedré assure. Le public en sort conquis.

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