Usque ibunt?

Publié le 26 octobre 2010 par Bernard Girard
Les auteurs de science-fiction ont inventé la machine à remonter le temps. Les députés UMP paraissent la leur avoir empruntée. Après le recul de l'âge du départ en retraite qui nous ramène aux années 70, voilà que  Jean-François Coppé veut réintroduire un examen de passage en sixième. Je n'invente rien, c'est ce qu'il a déclaré au Journal du Dimanche : "Je veux défendre une idée forte : l’entrée au collège ne doit se faire que pour l’enfant qui maîtrise totalement les savoirs fondamentaux (…) Mon idée est de créer un examen de fin de CM2, d’évaluation des enfants. Ce serait un examen de passage en 6e. On réorganiserait complètement le programme du primaire dans cette perspective (…) Si on n’a pas acquis ces connaissances (lire, écrire, compter...), mieux vaut redoubler, pour protéger l’enfant, que le faire passer au collège et lui faire courir un vrai risque de décrochage."

Je suis sûr que cette idée en fera sourire certains mais pourrait bien trouver des défenseurs chez ces enseignants qui se plaignent du niveau de leurs élèves (récrimination classique, il me semble l'avoir entendue tout au long de ma scolarité). 

Cet examen, dans sa version obligatoire, a été supprimé à la fin des années cinquante. Pour avoir été l'un des derniers à l'avoir passé, je peux témoigner de ce qu'il avait pour conséquence :
- d'éliminer de l'enseignement long, tous ceux qui échouaient (il est vrai qu'existait alors une filière courte vers laquelle on dirigeait les plus modestes qui n'avaient pas la chance d'être particulièrement travailleurs ou doués). Je me souviens encore de l'hécatombe dans ma classe de septième d'une école parisienne qui avait cependant bonne réputation. La sélection se poursuivait toujours aussi impitoyable, les années suivantes, entre ceux qui restaient dans la filière classique (latin) et ceux que l'on envoyait dans la filière moderne (sans latin),
- d'amener les instituteurs à pratiquer un bachotage intense. Le mien imposait à tous ses élèves de rester le soir deux heures de plus pour préparer l'examen.

Je me souviens également que nous avions eu cette année là une dictée empruntée à Gide, ce qui avait fait jaser dans les gazettes.