L’un comme l’autre ne vont pas nécessiter de longues et pompeuses présentations. Le premier est une organisation internationale qui agit pour la liberté de la presse dans le monde. Le second est une chronique quotidienne (lundi au jeudi) diffusée dans le “Grand Journal” de Canal +, animée par Yann Barthès et qui traite de l’actualité sous un angle sarcastique, moqueur, en tous les cas irrévérencieux.
Une fois les présentations faites, il s’agit de considérer deux informations distinctes. Tout d’abord, RSF a publié il y a quelques jours de cela son classement mondial de la liberté de la presse à travers le monde. Tandis que des pays comme la Corée Du Nord, l’Iran, Cuba ou encore la Chine occupent encore et toujours les dernières places de ce classement, la France “arbore avec distinction“, une très sémillante quarante quatrième place des nations où la liberté de la presse est la mieux préservée (vingt cinq places de perdues en quatre ans). Pour une nation qui s’enorgueillit d’être le chantre des droits de l’homme et des libertés individuelles, ce classement laisse songeur.
De l’autre côté, nous avons un extrait du “Petit journal“ faisant état d’un mini sommet politique qui s’est tenu il y a quelques jours de cela du côté de Deauville. Jusque là rien de bien anormal qu’une équipe de Canal Plus suive cet événement. Les choses se compliquent lorsque douze personnes (quatre équipes de trois personnes) se sont relayées jours et nuit auprès de l’équipe du “Petit Journal” afin de les suivre à la trace. Ces “suiveurs” n’étaient autre que des officiers des renseignements généraux et de la Bac.
Précisions d’usage, le “Petit Journal” s’est fait une spécialité de vilipender les politiques à longueur d’édition en notant tous leurs petits travers ainsi qu’en s’obstinant à ressortir à tous moments des archives qui viennent démolir les dernières promesses en date. Par ailleurs à ce sommet, des personnalités politiques de premier plan étaient présentes, d’où une présence policière plus imposante qu’à l’accoutumée.
Désormais, vous avez sans doute comme moi effectué le lien entre le dossier de RSF et cette séquence du “Petit Journal“. Comment en France, l’Etat et ses institutions peut-elle exercer un rapprochement si pernicieux ? Comment garantir à la presse et aux médias une liberté d’agir et de dire quand trois agents de l’Etat suivent une équipe de télévision vingt quatre heures sur vingt quatre ? Même si cet exemple est traité à la manière Canal Plus, c’est à dire avec une dérision qui leur est identitaire, le fait est là et ne doit à aucun moment être pris à la légère. Deauville n’est pas un zone de conflit où la présence policière servirait à garantir la sûreté des journalistes, leur présence ici même est purement dissuasive et contraignante dans l’exercice de leur travail.
Quand le contrôle d’un plan de communication étatique empiète outrageusement sur la liberté d’expression, on comprend d’autant plus aisément que la France se retrouve en queue de classement des grandes démocraties de ce monde en terme de liberté de la presse.
PS : la coïncidence mise en lumière ici donne consistance à ce propos, il demeure qu’une étude densément exemplifiée dans tous les domaines médiatiques apporterait la force à un état de fait magnifiquement mis en évidence par le “Petit Journal”.
EXTRAIT DU PETIT JOURNAL DU 21 OCTOBRE 2010
Références : Canal +, Petit journal, Politique, Réflexion, RSF Réactions de lecteurs