Il s’agit d’un journal d’écrivain disait la quatrième de couverture et parce que j’y ai cru, je me sens trompée maintenant. En réalité c’est ce que j’appelle un livre fourre-tout, le rassemblement de ce qu’on peut écrire ici et là, sur tout et sur rien au fil des jours, pendant une année, ici 2009. Ce sont des petits textes très inégaux. J’en ai aimé certains et d’autres pas du tout si bien que je n’ai pas lu ce livre comme un volume ordinaire mais comme on feuillette un magazine, au petit bonheur la chance, de gauche à droite, de droite à gauche aussi parfois, au hasard et comme il n’y a pas de table des matières, impossible par conséquent de choisir les thèmes! Aucun guide! Pas de titres non plus, ni de dates au début des chapitres! Pauvre lecteur abandonné dans la brousse des pages noires et blanches! Qu’il se débrouille! Tant pis pour lui s’il est perdu au milieu des réflexions d’un auteur qu’il ne connaît pas ou peu, juste ce qui est écrit au dos du livre :
Romancier et essayiste, Sébastien Labaque a déjà publié chez Actes Sud plusieurs livres dont «Georges Bernanos encore une fois». Ce n’est qu’à la dernière page que j’apprends que l’auteur tient un bloc-notes publié chaque semaine dans «Témoignage chrétien» et qu’il s’agit là de la matière principale du livre avec ajout de souvenirs de lectures et d’articles parus dans le Figaro littéraire. Un pot-pourri en somme! Un contre-journal dit l'éditeur, conçu dans l'actualité, enrichi de réflexions, voyages, lectures, digressions, conversations et sautes d'humeur, irrigué par une pensée anticapitaliste, une foi et un engagement d'anarchiste chrétien.Fatigant! Je me suis intéressée à quelques passages mais à force de sauter d’une idée à l’autre, sans lien entre elles, je me suis très vite lassée! Pourtant j'aime beaucoup le principe même du journal tenu par une personne qui écrit bien et qui a des choses à dire; celui de Nabe, de la vraie dynamite , restant pour moi une référence absolue, non pour ses idées que je ne partage pas mais pour son audace et son talent littéraire!Je me souviens d’une collection, au Seuil, qui sortait le journal d’un écrivain chaque année entre 1990 et l’an 2000 et j’avais trouvé cela passionnant car chaque auteur s'y impliquait vraiment et je retrouvais dans l’ordre chronologique les faits marquants d’une actualité que j’avais vécue moi-même. J’ai lu ainsi d’un bout à l’autre le journal de Michel del Castillo, L' Adieu au siècle, journal de l'année 1999 ainsi que celui de Philippe Sollers L'année du tigre , journal de l'année 1998, et de quelques autres. Mais ici, ce n’est pas le cas, c’est décousu et en fin de compte malgré toute ma bonne volonté, je n’ai fait que picorer. J’ai apprécié le passage concernant La Princesse de Clèves, et l’évocation des foulards jaunes arborés par les enseignants qui manifestaient au Panthéon pour marquer leur attachement à ce roman que le Président de la république considérait comme l’exemple même du savoir inutile exigé des fonctionnaires. Pourquoi un foulard jaune ? Parce que le jaune est une couleur qu’affectionne la princesse de Clèves. M. de Nemours avait du jaune et du noir ; on en chercha inutilement la raison. Mme de Clèves n’eut pas de peine à le deviner : elle se souvint d’avoir dit devant lui qu’elle aimait le jaune.J’ai aimé aussi cette réflexion sur le certificat d’études : C’était l’honneur des enfants de paysans, d’ouvriers et de petits employés fiers de s’être haussés, au terme de leurs études primaires, à un niveau de maîtrise de l’orthographe, de la grammaire, de la rédaction, du calcul, de l’histoire-géographie etr des sciences qui allait leur permettre de trouver un métier. Derrière le certif, il y a l’idée que tout salut personnel et national vient de l’instruction. J'ai aimé d'autres passages encore mais c'est le principe même du livre que je n'aime pas, trop décousu, sans lien entre les textes et surtout sans véritable réflexion sur l'absolu, qui serait pourtant, selon l'auteur, la seule chose qui donnerait un sens à la vie...dans le monde qu'on nous prépare, un monde de cinquantenaires à Rolex au poignet et à jolie fille au bras où nous allons mourir d'ennui..Dommage! Il aurait juste fallu un peu plus d'exigence dans la présentation et d'attention envers les lecteurs pour que ce recueil devienne agréable à lire!
Au hasard et souvent, par Sébastien Lapaque, Actes Sud, 2010, 174 p.