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Black Angels

Publié le 24 octobre 2010 par Cloudsleeper

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Interview et chroniques à paraître dans le prochain Rif Raf de novembre:

Nebula Oscillator

Quel est ce karma qui nous poursuit pour qu’on croise tous les deux ans la trajectoire ces oiseaux de mauvais augure ? Pourquoi reviennent-ils sans cesse à la vie éprouvant dans l’angoisse et la souffrance des sons et des impressions déjà mille fois vécues ? Pour exorciser quelques démons intérieurs ? Pour en retirer quelque expérience nouvelle et salvatrice ? Oui bien sûr on a déjà vaguement entendu ça, mais où était-ce ? Et dans quelle vie ? Tout cela a—t-il vraiment existé ? Peut-être vaut-il mieux qu’on ne s’en souvienne pas, car ici dans le Texas de W, on dit que celui qui se souvient de ses mandats précédents doit mourir… le rappel serait trop lourd à porter. Alors délaisse ton mental, livre-toi au néant et écoute Alex Maas, la tête brûlée de l’équipage des Black Angels, qui évoque en communication brouillée leur troisième album qui devrait envoyer le groupe dans les meilleures mémoires d’outre-tombe.

Avec un titre d’album dopé aux phosphènes et aux rêves hallucinés, on retrouve bien votre marque de fabrique pourtant pas mal de choses ont changé depuis ‘Directions To See A Ghost’ notamment dans la production…

Alex Maas : « Notre intention était de porter notre son plus loin que ce qu’on avait fait précédemment. On a eu la chance de pouvoir collaborer avec Dave Sardy avec qui on a pu pousser l’expérimentation d’une façon assez différente et il a apporté des contours plus précis. En même temps le fait de travailler avec lui nous a sorti de notre Texas pour aller chez lui à Los Angeles, ce qui a fait évoluer notre imaginaire également. »

L’aspect mélodique semble être plus travaillé et tu chantes plus que tu ne psalmodies, comme si tu voulais utiliser ta voix d’une autre façon.

Alex Maas : « Oui là aussi Dave nous a aidé à trouver la chanson à l’intérieur de la chanson, totalement psychédélique comme truc. Et comme on est très fan du vieux rock mélodique comme les Troggs et les Beatles, on a beaucoup bossé sur les harmonies pour repousser nos barrières et obtenir en même temps quelques choses de moderne grâce à son expérience. Les parties vocales sont vraiment utilisées comme des instruments au même titre qu’une guitare, un clavier… Dans la chanson ‘True Believer’ par exemple je chante sur un registre beaucoup plus aigu. »

Ta voix est confondante de similarité avec celle de Grace Slick de Jefferson Airplane.

Alex Maas : « Oui c’était plutôt fortuit au départ, mais la chanson s’est mise comme cela. C’est une chanteuse fantastique et le Airplane nous a évidemment beaucoup marqué. En même temps on s’est rendu compte qu’on avait d’habitude beaucoup de titres mid-tempo et avec une chanson comme ‘Telephone’ on a voulu faire quelque chose de plus rapide et qui offre une atmosphère plus légère comparé à ‘True Believer’ justement. A priori ce n’est pas la direction de notre groupe, mais on a pris notre pied à jouer un truc comme ça, presque dansant en fait ! »

Est-il exact que vous refusez l’étiquetage « psychédélique » pour qualifier votre musique ?

Alex Maas : « Non ça ne me dérange pas en soi, mais le mot signifie beaucoup de choses et il est tellement galvaudé par les journalistes qui associent tout et n’importe quoi à cette musique des années 60 et aux drogues etc. À la base pour moi c’est simplement la recherche d’une musique qui emmène ton esprit ailleurs et te fait voyager intérieurement. Et l’esprit de ce type de musique n’a pas été inventé avec les sixties. Il a toujours existé surtout dans les sociétés tribales dans les expériences initiatiques et chamaniques, c’est une excursion spirituelle. Mais on n’a pas la volonté de s’attacher à tout prix ce qualificatif car il change tout le temps et nous changeons aussi. »

La musique psyché se définit par excellence comme une musique à message à faire passer à la conscience ou à l’inconscient. Avez-vous aussi cette intention ?

Alex Maas : « Chacun se pose la question de savoir ce qu’on va faire de cette vie qui nous est donnée sans avoir rien demandé. Chacun emprunte donc différents chemins dans la vie et arrive à un certain niveau de connaissance de soi et du monde et disons que la musique est un moyen pour témoigner de ces découvertes. À partir de cela, le public et les fans vont donner leur propre interprétation de ce que nous livrons dans nos chansons. Cela doit rester ouvert et très libre et chacun doit découvrir et devenir la vérité qu’il a trouvée. »

La musique psyché peut-elle encore être subversive comme elle l’étais à l’époque ?

Alex Maas : « Comme je disais c’est assez difficile de décrire la musique psychédélique aujourd’hui. Néanmoins je trouve nécessaire de véhiculer un message. Qu’il soit subversif ou révolutionnaire ou quoi, m’est un peu égal. Mais il faut au moins attirer l’attention des gens sur des thèmes qui nous semblent significatifs dans le monde où nous vivons. Beaucoup de gens sont indifférents à tout et, en tant que groupe, on veut montrer qu’on se soucie de ce qu’il se passe aujourd’hui dans notre monde qui est de plus en plus instable. »

Vous avez des paroles qui sont assez acerbes comme dans ‘Phosphene Dream’ où vous dites « Our President then was dead to us ; he takes his pill so he can kill. Praise the Bible ».

Alex Maas : « Oui c’est un point de vue américain disons, assez franc et pas spécialement répandu. La plupart des gens en Amérique ne se soucient pas de ce qu’il se passe dans le monde ce qui est assez dramatique. Personnellement, je souhaiterais qu’ils soient plus impliqués. »

Jim Morrison avait pour habitude de dire que le rock et les rock-stars sont des politiciens érotiques. Est-ce que cela t’inspire encore ?

Alex Maas : « Je ne cois pas que tout ceux qui font de la musique et qui sont des stars ont besoin de s’identifier à cette idée de Jim Morrison. Mais le fait que la plupart des gens s’intéressent plus à Justin Biber et Britney Spears qu’à tout autre chose dans la vie démontre qu’il avait en partie raison. C’est à présent l’érotisme et le produit qui l’a emporté sur la signification et la valeur réelle. Ceci dit, les Doors, Velvet, les Stones, ils étaient tous de supers musiciens mais en dehors de ça ils ont pu être de sacrés connards aussi ! Pas vraiment des gens super au niveau humain : destructeurs, manipulateurs, ego surdimensionné... mais moi ce qui m’intéresse dans tout ce bordel c’est ce qu’ils ont créé, c’est leur art, leur musique. Je peux avoir beaucoup d’admiration pour l’art créé mais pas pour l’artiste en lui-même et c’est souvent ça avec ces musiciens de cette époque. »

Pour ce troisième album, vous avez signé sur le label anglais Blue Horizon qui fut le label phare du British blues boom dans les années 60. Pourquoi avoir signé chez eux et pas directement sur une major comme Warner qui détient Blue Horizon ?

Alex Maas : « Signer chez eux c’est un peu avoir le meilleur des deux mondes. Les gars qui tiennent ce label depuis si longtemps ont fait tellement pour la musique et ont un tel feeling artistique tout en ayant une grande expérience business dans le créneau musical où nous sommes. Avec eux on est vraiment considéré comme un groupe de premier plan et on reçoit toute l’attention nécessaire, ce qui ne serait pas le cas sur une major où on ne serait qu’un produit parmi tant d’autres. »

Un mot sur les concerts que vous avez donnés en Europe et en Belgique récemment ?

Alex Maas : « Je te dis un truc mec, c’est que le concert à Bruxelles était le plus intense de tous, vraiment je rigole pas. Le public était vraiment dingue, un concert incandescent, un sacré souvenir ce show en Belgique ! On revient en février ! »

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Natacha Atlas

‘Mounqaliba’

World Village/Harmonia Mundi

De ses débuts avec Transglobal Underground à sa carrière solo brillamment défendue, Natacha Atlas pouvait se targuer d’afficher une carrière fort intéressante dans les arcanes de la musique electro-orientale. Montrant toutefois d’inévitables signes d’essoufflement sur un disque comme ‘Something Dangerous’, elle réussit à se réinventer sur ‘Ana Hina’ où tout son attirail électronique fut passé au rebus au profit d’un orchestre arabe avec lequel elle interprétait un répertoire populaire autant réjouissant qu’innovant. Poursuivant sa carrière au gré de ses goûts et de son talent vocal toujours aussi impressionnant, la voilà de retour et franchement elle n’en finit pas d’étonner. Entourée une fois encore par un orchestre arabe (ce « retour aux sources » lui ayant si bien réussi) de haute tenue, elle s’est adjoint les services d’une pianiste de jazz exceptionnelle, Zoe Rahman. Dotée d’un doigté d’une grande délicatesse, elle amène une sorte de romantisme arabisant à cet album duquel découle une mélancolie et une sensibilité, toute orientale certes, mais qu’on avait peu entendu chez Natacha Atlas. En outre les cordes somptueuses, constamment en contrepoint à ce piano, font de ce huitième album solo une véritable fresque cinématique et lyrique. ‘Mounqaliba’ sonne comme disque tout à fait à part et on doute qu’il y ait grand chose qui puisse encore arrêter cette chanteuse aux ressources décidément inépuisables. (jd)

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Kaly Live Dub

‘Lightin’ The Shadows’

Jarring Effects/Discograph

La scène lyonnaise comporte nombre de groupes aux tendances electro-jamaïcaines de toutes sortes. Kaly Live Dub n’est pas le dernier-né d’entre eux car il sort ici son cinquième opus. Poussant désormais l’expérimentation jusque dans les sombres sentiers du dubstep, les structures sont complexifiées, les sons de plus en plus triturés et KLD fait preuve d’une discernement intéressant dans ses nouvelles compositions : des plages lourdes et mélancoliques s’étirent pour mieux exploser en des groove intergalactiques (‘Light’s Thief’, ‘Moog Lee’). ‘Conflicts’ est une estocade hip hop convaincante sur lequel K-The-I, échappé de Big Dada, pose un flow atypique et sous tension, évoquant le spoken words de Saul Williams. Je ne pige pas tout dans cet univers sonore âprement entortillé, mais je me dis que, un peu comme pour un cerveau, ce type de son utilise 100% des capacités des baffles et du cerveau là où les autres se contentent de 60%. Est-ce cela aussi le dubstep : élargir la conscience sonore de notre hi-fi et de nos cerveaux ? Bon mais pas trop non plus, je l’aime bien moi ma caverne. Comme si le groupe m’avait entendu, il a la très bonne idée de proposer en deuxième partie d’album une série de titres de dub roots flamboyants (‘Peaceful Warrior’, ‘Radical In The Vatican’) aux grooves moins abstraits apportant à l’album le kick qui en fait une pièce bien captivante et remuante à écouter d’un trait. Un album mature, imaginatif et intense, de quoi rassasier les sounds systems avec des sons particulièrement bien amenés. (jd)

John Legend & The Roots

‘Wake Up’

Columbia/Sony

Réunion au sommet entre deux importants protagonistes de la black music des Etats-Unis. Les immenses The Roots et leur rap versé dans le jazz, le funk, la soul et ayant pour particularité de constituer un véritable orchestre ce qui n’est pas fréquent dans le secteur. De l’autre un des king du soul revival mais doté d’une voix et d’une crédibilité live parmi les plus accomplies, John Legend. L’idée de ce dernier était de faire un album reflétant l’époque de changement socio-politique important avec l’élection d’Obama en puisant son inspiration dans la musique noire de la fin des années 60, également une époque de mutation… Et avec qui pour collaborer ? The Roots ! En voilà une bonne idée. Pourtant le résultat est en dessous de ce qu’on aurait pu espérer d’une telle rencontre. Les reprises sont très bien choisies (notamment pour leurs textes intelligemment engagés), impeccablement interprétées et produites. Pourtant au bout du compte, on a un album un peu mou du ventre comme si la magie était inopérante… est-ce cette malédiction de vouloir refaire de l’ancien avec du neuf  (cf. le ‘I Wish I Knew How It Was To Be Free’ qui passe émotionnellement inaperçu alors que c’est un titre emblématique de Nina Simone et du mouvement Noir) ? C’est qu’il y a à inventer autre chose plutôt que de s’inspirer continuellement des anciens qui finissent pas devenir des poids. Peut-on espérer des prestations live d’anthologie lorsqu’on connaît la réputation scénique des deux protagonistes ? (jd)

Cheikh Lo

‘Jamm’

World Circuit

Cinq années qu’on n’avait plus de nouvelles du Burkinabais, alors qu’il était actif depuis une trentaine d’année et qu’il nous avait laissé quelques beaux moments musicaux tout en chaleur et en décontraction. Puis un beau matin il a pris sa guitare et une petite percussion et a commencé à gratouiller sur les mélodies et les rythmes qu’il voulait obtenir. C’est à peu près comme cela que sont nées les dix nouvelles chansons de ‘Jamm’… y a des matins fous où tout change tout d’un coup et le cœur se remet debout comme dit France Gall. Et alors ? Et alors ‘Jamm’ swing typiquement à la manière de ces rythmes qui ont déferlé dans les années 60 et 70 en Afrique… Que ce soit en wolof, en français ou en espagnol, Tabu Ley Rochereau et la rumba ne sont jamais loin mais rendus ici dans un style encore plus laid back. Même le funk de ‘Bourama’ (un petit qui emprunte un vélo sans rien dire et le rend tout cabossé…) est joué ici sur un mode « sitting » et c’est vrai qu’après tout il n’est point nécessaire de forcer la dose, le propos de Cheikh Lo n’a jamais été là. Une tranquillité certaine habite cet album et c’est peut-être là l’unique propos lorsqu’on sait que ‘Jamm’ veut dire la paix… toute la clé est là ! C’est une musique attachante et douce que nous propose Cheikh Lo dont les notes simples et ensoleillées (‘Folly Cagni’ ou ‘Ne Parti Pas’ mon favori) vont nous tenir longtemps de bonnes vibes matinales cet hiver. Et tout le monde chante, amor tambien…(jd)


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The Moon Invaders

‘Live At The AB Club’

Grover Records

The Moon Invaders fut fondé à Bruxelles début 2001 et n’en finit pas de soulever les foules album après album et concerts après concerts. C’est qu’ils font de la musique jamaïcaine comme personne : une haute dose de ska, de reggae roots, de dub bien sûr mais aussi des touches de rhythm’n’ blues et de rocksteady pour des compositions terriblement fraîches et originales. Les voix, les mélodies excellentes, les cuivres toujours enjoués, tout rappelle les grands jours du Studio One et on peut se réjouir que ce groupe soit l’un des fidèles de cette « mouvance ». Leurs performances scéniques ont précédé leur réputation discographique et il fallait impérativement immortaliser leurs prestations endiablées. Le rendez-vous fut pris à l’AB et l’on retrouve sur ce disque tout ce qui fait le talent du groupe avec la participation active du public qui chante sur les titres les plus accrocheurs (beaux échanges sur ‘Can’t Keep A Good Man Down’) et danse de plus belle. Outre ces titres, on entend un hommage appuyé à la Big Easy, New Orleans, avec ‘Congo Square’ et ‘Rebel With A Wallet’ dont les cuivres et le groove agile ont du sérieusement calciner la scène de l’AB. Sure shot pour le groupe qui a regroupé ici deux concerts d’anthologie à écouter, réécouter et (re)voir sur scène ! (jd)

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Lobi Traoré

‘Rainy Season Blues’

Glitterhouse Records

Lobi Traoré était l’un des émissaires du blues bambara qu’il présenta pour la première fois comme telle dans un album éponyme datant de 1991. Sa carrière l’amena à tourner en Afrique, en Europe et en Amérique où son jeu de guitare électrique complexe et foudroyant lui valait des comparaisons avec Holwin’ Wolf ou Lightnin’ Hopkins. Il joua sur le Mali Music de Demon Albarn et en 2005 il sortit ‘The Lobi Traoré Group’ qui restera comme l’une des pièces maîtresses du blues malien, arrivant avec un naturel incomparable à unir la tradition musicale bambara avec un blues rock aussi âpre que vigoureux. Le bonhomme nous a hélas quitté en juin dernier et ce disque est ce que le producteur des Tamikrest, Chris Eckman, a eu l’occasion d’enregistrer avec lui à l’arrache, dans l’espoir de lui retrouver un label. Imaginez-vous juste le bonhomme cloîtré un jour de pluie dans un studio déglingué de Bamako grattant seul ses inlassables tourments, ses invectives, ses odes à ses proches et à la vie et quelques germes de sagesse. Bien sûr il y a eu Ali Farka mais Lobi, lui, travaille des riffs plus teigneux et rêches comparés au style plus ornementé du grand maître… En cela, Lobi se rapproche un peu plus du Mississippi, comme en atteste le titre d’ouverture qui vous prend à la gorge dès la première mesure. Et toujours, toujours ce rythme binaire sur lequel trébuchent ces mots de vauriens… mais quel que soit le côté de l’Atlantique où l’on vit, le blues est finalement le même et Lobi Traoré, mieux qui quiconque, est passé pour nous le rappeler. (jd)


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