Exprimer ses opinions est-il forcément un appel à l'action ? C'est en tout cas ce que pense la justice russe qui a condamné le journaliste, activiste et éditeur radical Boris Stomakhine à cinq ans d'emprisonnement pour "appels publics à une activité extrémiste" et "incitation à la haine nationale" le 20 novembre 2006. Ce sont notamment les déclarations suivantes qui ont choqué les autorités russes :
"La Russie moderne est l'Empire du Mal et doit donc être détruite",
"Les Tchétchènes ont un droit moral de faire sauter en Russie tout ce qu'ils veulent, après ce que la Russie et les Russes ont fait d'eux",
"Que des dizaines des nouveaux snipers tchétchènes prennent place sur les pentes des montagnes et dans les ruines urbaines, et des centaines, des milliers d'agresseurs tomberont sous des balles justes ! Aucune grâce ! Mort aux occupants russes !"
Boris Stomakhine est un grand défenseur de la cause tchétchène, il considère Chamil Bassaev et Salman Radouïev comme des héros de la résistance tchétchène et donne toute légitimité à leurs activités terroristes, ce qui a tout pour déplaire à l'État russe. La justice a commencé ses poursuites en avril 2004 (perquisition, confiscation, tentative d'internement) et il est finalement arrêté le 21 mars 2006. Ce jour-là, il saute du 4e étage pour échapper aux forces de l'ordre, ce qui lui a causé de nombreuses blessures au dos et à la cheville. Sa famille a d'ailleurs demandé sa libération durant son procès pour qu'il puisse se soigner, ce que les autorités judiciaires ont refusé. Valeria Novodvorskaïa, dissidente politique et porte-parole de l'Union démocratique, a déclaré à ce sujet : "Une grande tragédie est arrivée en Russie. Le destin malchanceux de Stomakhine a marqué une nouvelle époque dans le domaine de la justice, celle où les autorités judiciaires n'ont pas honte de mettre un handicapé dans le box. Ils l'ont apporté sur une civière et l'ont posé dans le box avec une froideur totale, et quelquefois il montait au cinquième étage en béquilles." Elle a ajouté : "D'un point de vue juridique Stomakhine ne pouvait pas être inculpé sous l'article 282 du code pénal de la Fédération de Russie, parce qu'il n'est pas un représentant d'une minorité ethnique qui pourrait être condamnée pour russophobie. Boris Stomakhine est russe. Et donc il aurait incité à la haine ethnique contre lui."
Aujourd'hui Boris Stomakhine est donc emprisonné dans une prison de la région de Nijni Novgorod. Il a le soutien de nombreuses organisations de défense de la liberté d'expression : le fonds de défense de la Glasnost, Article 19, le Comité de défense des journalistes, la section russe de l'organisation mondiale des écrivains, … Vous pouvez lire ses vers sur son site de soutien, qui demande notamment de lui envoyer une lettre, pour la nouvelle année et à tout moment pour le soutenir, à l'adresse suivante : 606935, Нижегородская обл., Тоншаевский р-н, пос.Буреполом, ИК-4, отр.13, Стомахину Борису Владимировичу.
О Борисе Стомахине