N'y a-t-il rien de plus grave et de plus urgent que le réchauffement climatique ?
Publié le 05 janvier 2008 par Roman BernardAncien abonné, quand j'étais au collège, de Science & Vie Junior, puis, quand j'étais au lycée, de Science & Vie, j'ai été familiarisé dès mon plus jeune âge à la question de l'effet de serre, son origine anthropique, ses conséquences directes sur l'environnement et ses implications à venir pour l'évolution du mode de vie des sociétés post-industrielles.
J'ai longtemps parlé dans le désert quand je faisais la leçon à des personnes de mon entourage qui prenaient la voiture pour faire quelques hectomètres. Je suis donc toujours frappé lorsque, essayant de nuancer l'imminence du danger climatique, je suis pris à partie par des personnes qui, manifestement, ignoraient jusqu'à l'existence de ce phénomène avant qu'il ne jouisse d'une grande publicité, notamment médiatique. Jusqu'à il y a quelques années, seuls quelques Cassandre comme Jacques Attali alertaient l'opinion sur les dangers de l'augmentation de la concentration de CO2 dans l'atmosphère, et cette ignorance du changement climatique chez l'immense majorité des citoyens me choquait.
À présent, c'est l'inverse, on ne parle que de ça, non seulement dans les médias, dans les débats politiques, mais aussi dans la vie courante. Les discussions de café du commerce, à l'été 2003, ont commencé à entrer en résonnance avec les discours des écologistes, puisque la fameuse canicule, décrite par certains comme une manifestation du réchauffement climatique, a entraîné la mort de 15000 personnes âgées. Une opinion très peu informée du problème a donc commencé à interpréter tous les aléas de la météorologie comme les conséquences de la trop grande consommation d'hydrocarbures par les sociétés développées et en développement. Avec si peu de recul sur des phénomènes d'une si grande ampleur, il conviendrait pourtant d'adopter une attitude plus critique, plus méfiante à l'égard des généralisations abusives.
Une chose est de constater, avec des indicateurs objectifs, que la température terrestre s'élève, ce que nul ne conteste, une autre est de conclure que l'homme en est forcément l'origine première. N'étant pas scientifique, je m'en remets aux conclusions des experts, qui attribuent majoritairement le réchauffement climatique à l'homme et à son mode de vie. Mais d'autres scientifiques avancent des arguments opposés, et je les écoute avec la même attention. Quelle que soit l'urgence du danger climatique, le débat scientifique doit pouvoir continuer.
Or, les chercheurs, comme Claude Allègre, qui ont tenté de minimiser le réchauffement climatique ou qui en ont attribué la cause à des facteurs astronomiques, ont été systématiquement censurés, caricaturés, ostracisés. La liberté d'expression n'est pas moins importante que la préservation de l'environnement, et cela n'est donc pas acceptable. Ajoutons que, quand bien même on reconnaît, comme je le fais après avoir lu des articles écrits par des scientifiques, que le réchauffement climatique est bien dû à l'homme, on peut douter que ses conséquences soient si terribles que cela.
Rappelons que, à une époque où la température du globe était plus élevée de quelques degrés, il y a plusieurs dizaines de milliers d'années, l'actuel Sahara était une immense plaine fertile. Considérons également que si le réchauffement climatique se confirme et s'il est important, hypothèse sur laquelle les experts qui ont droit de cité divergent, le défi réside moins dans la limitation des émissions de dioxyde de carbone, rendue illusoire par l'hypercroissance de pays très peuplés comme la Chine, l'Inde ou le Brésil, que dans l'adaptation aux conséquences les plus brutales du réchauffement climatique.
Si les terres situées au niveau de la mer, ou en-dessous, venaient à être submergées du fait de la fonte des calottes glaciaires et des glaciers montagneux, on est en droit d'espérer que la solidarité internationale jouerait pour recueillir les personnes qui en seraient chassées. Cette solidarité internationale pourrait aussi consister à construire des digues, des pompes, des canaux, qui, comme aux Pays-Bas, pourraient continuer à permettre la vie normale de millions de personnes vivant en-dessous du niveau de la mer.
Solidarité internationale qui permettrait aussi, dans le pire des cas, le déplacement de populations sur des terres rendues fertiles et habitables par le dégel des sols, comme au Canada ou en Sibérie. Toutefois, l'épuisement des énergies fossiles, qui est directement lié, est un danger que, pour le coup, nul ne peut tenter de nuancer.
Tant que l'activité humaine dépend essentiellement du pétrole et de ses dérivés, la consommation excessive d'hydrocarbures, occasionnée par les modes de vie des sociétés développées ou en développement est un problème majeur : la demande croissante de pétrole et de gaz, à l'origine de la flambée de leurs cours, obère les économies, et donne un pouvoir de chantage très important aux pays producteurs et exportateurs, comme les exemples actuels de l'Iran, de la Russie ou du Venezuela le montrent bien.
Il n'est pas à exclure, si cette demande continue à augmenter et que la découverte de réserves ne suit pas, que l'on en vienne à se battre de plus en plus pour le pétrole -la guerre d'Irak en est peut-être un signe avant-coureur-, comme on se bat déjà pour l'eau en Afrique ou au Moyen-Orient.
L'instrumentalisation de la peur du réchauffement climatique, que je comparais récemment à une peur millénariste, eschatologique, aura peut-être pour effet bénéfique de sensibiliser les populations à la préciosité du pétrole. Reste que, celui-ci n'étant pas éternel, il faut bien songer à le remplacer -ce qui libérerait du même coup nos sociétés de ce chantage des pays producteurs.
Étonnant, dès lors, que ceux qui s'alarment du réchauffement climatique et de l'épuisement des ressources fossiles soient souvent les mêmes qui veulent « sortir du nucléaire ». On pourra donc être circonspect devant certains discours écologistes, qui, sous prétexte de prôner la décroissance, sont prêts à accepter l'auto-destruction de nos sociétés au nom d'enjeux qu'ils ne discernent qu'approximativement.
J'ai déjà entendu des militants Greenpeace prétendre que la solution résiderait dans le développement des énergies renouvelables, ce qui est faux. Celles-ci ne résoudraient que partiellement le problème. À moins de revenir à un mode de vie pré-industriel, ce qui la mettrait à la merci des économies émergentes, l'Europe se sortira de l'impasse de l'épuisement du pétrole par la recherche, par la science, par la technologie, qui toutes trois nécessitent d'abord la croissance et le développement. Autant dire que si le statu quo en la matière n'est pas tenable, le retour en arrière n'est pas non plus envisageable, ni même souhaitable.
Mais le point final de mon raisonnement est celui de la priorité du danger : est-ce réellement, pour l'Europe, le réchauffement climatique -qui, certes, pourrait provoquer l'arrêt du Gulf Stream et donc de la douceur de notre climat qui est l'une des causes de notre développement- ou bien la dénatalité, qui touche tous les pays européens et qui rend nécessaire le recours à une immigration dont l'intégration est rendue difficile par les conditions économiques ainsi que les grandes différences culturelles -et religieuses- entre les populations extra-européennes et leurs sociétés d'accueil ?
On peut, comme Al Gore, penser que la réchauffement de 1 à 3 ° du globe constituerait la pire catastrophe de l'histoire de l'humanité. Qu'il me soit permis de douter de la capacité de l'homme à détruire une nature qui le dépasse. Et qu'il me soit aussi permis de m'émouvoir davantage de la mort annoncée de l'Italie, de l'Allemagne, de l'Espagne, dont les populations vont décroître dramatiquement au cours de ce siècle.
Roman Bernard