Frappés par la crise du Marchet

Publié le 22 octobre 2010 par Albumsono

Florent Marchet - Courchevel

La messe du « 20 heures ». Un soir d’été. Toute la famille réunie devant la télé. En ouverture du journal, une foule de vacanciers. Ils ramassent des coquillages sur l’île de Ré. Les Marchet, eux, n’avaient pas la chance. Ils n’avaient pas les mêmes vacances. Le cadet, Benjamin, pense à son ami, parti l’hiver dernier à Courchevel. Il semblait avoir tout pour lui à Noël. Mais son cœur s’est éteint au retour du soleil.

Benjamin a la vingtaine bien passée, des rêves d’ados pleins la tête. La liberté en chœur, la solitude en fête. Toujours ses fringues d’étudiants. Qu’il est touchant. Parfois, on dirait qu’il n’a que nous. A côté, sa sœur, a l’esprit ailleurs. A son idole, un peu folle, rencontrée, rue du Bristol. Dévêtue, ras du sol, elle fut abattue en plein vol. L’effet des drogues, de l’alcool. Pour la mère, quelle angoisse. Depuis peu, elle se tracasse. Le bonheur n’est donc qu’une coquille creuse. Il faut qu’elle s’y fasse. Le cœur arrachée, ne lui reste plus qu'à prier.

A l’écran, un fait divers. A Roissy, un avion en feu. Des voix qui se sont tues. Lui avait hâte d’embrasser les paupières de l’aimée. Il demande : « As-tu trouvé les bagages ? La tête dans les nuages. » Pas de réponse. Juste un trou dans le cerveau. Un peu plus tard, ce sont deux corps d’enfants retrouvés au large. Pas loin de Narbonne-plage. Les parents s’étaient assoupis. Laissant dériver le bateau bleu et jaune de leurs petits. Benjamin pense dans sa tête. Jamais on ne saura. Si les enfants au fond. Ont pu du bout des doigts. Caresser l’horizon.

Son esprit divague. Un tube pop entendu à la radio. Mélodie entêtante, gimmick synthés, montée de cuivres qui tue sur le refrain. Et ce texte mordant : Frappe dans tes mains. Remonte la pente. Allez on chante. Avec ma tête qui fait peur. Si au moins j’étais chômeur. Non je ne suis pas un champion, je ne vais pas gagner des millions. Adieu petit univers. J’ai autres choses à faire. Adieu la famille Kinder. Sa famille à lui a une tête d’enterrement. Depuis tout petit, il se demande pourquoi sont-ils si tristes. Il sent bien qu’on lui cache des choses.

Ce que son père lui cache. C’est qu’au fait, lui aussi, la charrette, il en fait partie. Les vacances surprises des enfants, c’est tant pis. Il pense à son usine, ses années de labeur. La vie passe trop vite. Quel est le prix du mérite. Quand on est jeté comme ça. Hors-piste. Son visage devient blême quand à l’image, on suit un type comme lui, dépassé par ses problèmes. Plus de comptes à rendre, de rendez-vous, de choses à vendre. En fond, une musique. Mélancolique. Qui je-suis ? Dis moi, qui je suis. Plus rien du tout…

KidB