Avec les Petits Mouchoirs, Guillaume Canet signe son troisième long métrage après la comédie noire Mon Idole, et le thriller Ne Le Dis A Personne. Le voici revenant derrière la caméra (et non devant) pour un film chorale, un film sur l’amitié et la génération d’aujourd’hui. Un vrai grand film (plus de 2h30) rassemblant la fine fleur des comédiens d’aujourd’hui, pour une grande histoire d’amour à plusieurs qui évite les écueils et les difficultés.
Les Petits Mouchoirs, ce sont tous les petits secrets qu’une bande de potes se sont inventés au fil des ans. Une quinzaine d’années, et d’été en bord de mer, un mois par an. Un clan soudé en apparence, mais fissuré de partout, individuellement ou non. L’accident de l’un d’eux (Dujardin, le moins présent mais le plus brillant en seulement quelques scènes terriblement sobres et efficaces) sonne le glas de l’innocence, et malgré tout ils plient bagages vers le Sud, la mer et les vacances. Forcément, c’est l’occasion de se poser des questions, de se regarder en biais. Personne n’affronte la réalité, tout le monde la fuit dans une banalité exaspérante. Tout juste est ce là le temps de ressortir quelques vieilles discussions, révélations. Canet manoeuvre bien sa barque, dans sa longue odyssée où chacun trouve sa place. Film de potes, entre potes, les Petits Mouchoirs tisse sa toile entre chacun, prend le temps d’installer tout ce petit monde, entre rires et larmes, égoïsme et famille. Chaque individualité est ainsi creusée, livrée face à ses propres problèmes, ambiguïtés. Le film parle ainsi plus d’une génération que d’un groupe d’amis, de nos vies tournées vers nous mêmes plutôt que vers les autres. Le seul ayant décidé de s’oublier, étant éjecter dès le départ du jeu…
Et même si le final, prévisible, livre toute l’émotion nécessaire, il s’en faut de peu de passer à côté. La faute s’en doute à un peu trop de pathos livré en morceaux, dans un film dont la longueur alourdit un peu l’ensemble. Certes, Canet sait où il va, et malgré ces quelques passages un peu trop long, en revient à de simples gestes plus efficaces (la dernière scène..). Comme quoi il suffit de faire simple pour faire beau. Entouré d’un casting de prestige (Magimel, Lellouche, Cluzet, Arbillot, Bonneton sont formidables, Lafitte drôlissime, Dupuch merveilleux, et même Cottilard retrouve là un rôle humain), avec de vrais libertés, Canet également scénariste livre sans doute plus qu’un simple film, moins qu’un vrai classique, mais raconte sa vie. Une belle vision de l’amitié et des vérités à dire, sans réellement vouloir aller au fond des choses, de la noirceur des vérités, mais s’efforce de rester dans la beauté du portrait (multiple) ainsi tissé. On comprend la démarche, et les Petits Mouchoirs deviennent ainsi un film que l’on pourra revoir régulièrement, bercé d’une musique à la douce nostalgie d’antan. Dommage cependant qu’on passe à côté de vrais enjeux du film, qui nécessitaient de vrais confrontations, affrontements, déchirements. Ne souhaitant apparemment pas verser dans le drame pur, Guillaume Canet alterne humour et tensions pour amener le spectateur au terme de son voyage.
Aventure humaine, et tourment d’une génération, Les Petits Mouchoirs fait évidemment référence aux films de potes d’antan, dessinant sans beaucoup de glamour (mais un réalisme frappant) les gens d’aujourd’hui dans leurs forces et leurs faiblesses, mais sans oublier l’espoir.