Retraite et emploi des jeunes

Un des arguments des jeunes contre la réforme de retraite mobilise, pour le contrer, l’ensemble de la presse et des médias. Pas une émission, pas un article qui ne contredise cet argument des lycéens en lutte: “en reculant le départ en retraite de deux ans, vous allez augmenter le chômage des jeunes”.

Et tous ces grands analystes de nous expliquer que c’est faux, et qu’au contraire, le recul de l’âge du départ en retraite va créer des emplois pour ceux qui vont rentrer sur le marché du travail.

Très théoriquement, dans le cadre d’une analyse désincarnée d’un marché idéal, ils sont convaincants. Pensez donc: “si plus de gens travaillent, il y aura création de richesses et donc d’emplois” et de citer, en vrac, le Danemark et un ou deux autres petits pays. Ce serait vrai en Chine, actuellement, où le taux de croissance avoisine les 10%.

Cette analyse très théorique oublie tout simplement que, depuis les années 80, une part importante de la création de richesse s’est déplacée, du travail vers la finance et les dividendes et que ces messieurs en veulent toujours plus. C’est si vrai que, pour maintenir la demande, c’est l’endettement des ménages qui s’est accru, jusqu’à devenir un facteur prépondérant de la crise de 2008 dans un certain nombre de pays du monde, en France, la crise étant relativement amortie du fait du haut niveau de sa protection sociale et d’une règlementation du crédit que justement N. Sarkozy envisageait de supprimer pour la calquer sur les “subprimes” US.

C’est oublier aussi une évidence et une réalité proprement française: la création de richesse a été continue en France jusqu’à la dernière crise et pourtant, hors l’intermède 97-2002 et plus récemment de 2006 à 2008, le taux de chômage en France s’est maintenu avec un niveau structurel élevé chez les jeunes (25%) et les plus de 50-55 ans (50%). Le recul de l’âge de la retraite signifie que chaque année, 400 000 emplois ne se libèreront pas et mécaniquement, viendront faire monter le chômage de ceux qui arrivent sur le marché de l’emploi car, chez nous, la richesse créée va prioritairement à la rente.

C’est oublier une seconde évidence, c’est que toutes les études prévoient, pour la zone € et pour de longues années, une croissance molle ne dépassant jamais 2% dans le meilleur des cas, ce qui, toujours aussi mécaniquement, la rend incapable d’absorber le volant de jeunes arrivant sur le marché du travail. Sauvons les retraites comme on a sauvé les banques en 2008!

En bref, un argument mensonger pour justifier une baisse généralisée du montant des retraites des salariés, favoriser les entreprises promettant des retraites par capitalisations confortables (dont on a vu la réalité aux USA lors de la dernière crise), et obéir au Medef pour lequel il convient de nettoyer l’ensemble des mesures socialesqui ont encore survécu, à l’instar de ce que se met en oeuvre en Angleterre.

- “Personne ne maîtrise la situation”. Le Monde.

- “Réforme ou contre-réforme fiscale ?”. Le Monde.

- “Le Royaume-Uni confirme la suppression de 490 000 emplois publics”. Le Monde.