Lundi dernier, 18 octobre 2010, une initiative populaire a été déposée dans le canton de Neuchâtel ici. Elle a pour objet de soumettre à référendum obligatoire toute décision du canton en matière de nombre, dimensions et emplacements des éoliennes sur les crêtes du Jura ici.
Cette initiative lancée en avril 2010 a donc abouti. Il fallait recueillir 4'500 signatures, conformément à l'article 98 de la Loi sur les droits politiques, LDP, du 17 octobre 1984, ce dans un délai de six mois après publication dans la Feuille officielle, conformément à l'article 105 de la même LDP.
Dans ce délai de six mois 6'406 signatures validées ont été recueillies et déposées à la Chancellerie de l'Etat de Neuchâtel. Le nombre d'électeurs inscrits dans la République neuchâteloise est d'environ 110'000 sur une population totale de 172'000 habitants. Ce qui donne une idée du nombre de signatures requis - environ 4% du corps électoral - pour qu'une initiative populaire aboutisse dans ce canton. En l'occurrence près de 6% des électeurs inscrits ont signé l'initiative sur les éoliennes.
Dans l'intervalle le Conseil d'Etat de Neuchâtel a élaboré son Concept éolien cantonal 2010 qu'il a présenté en août dernier ici et qui était mis en consultation jusqu'au 15 octobre 2010. Il s'agit d'implanter pas moins de 59 éoliennes sur 5 sites du Jura neuchâtelois [la photo ci-dessus est un montage réalisé par les initiants ici] :
"Avec ces cinq sites, pour un total de 59 éoliennes, le Concept éolien neuchâtelois atteint un potentiel de production annuelle d’énergie électrique de 200 GWh correspondant à 20% de la consommation actuelle d'électricité du canton. Ce chiffre équivaut à la consommation d'électricité d'environ 57.000 ménages, soit plus de 70% de tous les ménages neuchâtelois."
Dans sa conférence de presse de lundi dernier le Comité d'initiative d'Avenir des crêtes, au peuple de décider! oppose à ce concept (juteux pour certains) deux arguments massues ici, qui ramènent les choses à de plus justes proportions et que je me fais un devoir de reproduire :
- " Chacun tente de tirer la couverture à soi pour se réserver des sites et profiter avant le voisin des bénéfices rendus possibles par le remboursement à prix coûtant de l'énergie éolienne introduit par la Confédération (et financé, cela va de soi, par les habitants de tout le pays) "
- Les éoliennes, d'environ 180 mètres de hauteur, d'une puissance de l'ordre de 3 MW, "sont inappropriées non seulement parce qu'elles défigurent nos paysages mais également parce qu'elles n'y fonctionnent que 15% du temps. C'est bien cher payé, pour bien peu d'énergie."
Plus loin le Comité d'initiative développe ce second argument :
- En Suisse "il faudrait 600 éoliennes de 2 MW (...) pour compenser une seule année d'augmentation de la consommation d'électricité (+2%)."
- "Le faible potentiel d'exploitation du vent en Suisse (au plus 3-5% de la consommation d'électricité, soit 1-2% de la consommation totale d'énergie) ne pourra jamais contribuer au remplacement de l'énergie nucléaire, qui représente 40% de la production nationale d'électricité"
Et décoche cette dernière flèche :
"L'édification d'une éolienne de 150 mètres de hauteur exige un socle de béton armé de 1'000 mètres cubes, qui restera dans le terrain à jamais, même après le démontage de l'éolienne."
Dans ces conditions il est indispensable que soit garantie "en la matière une procédure démocratique indépendante des appétits locaux et des intérêts financiers", d'autant que l'énergie éolienne apparaît de plus en plus comme une manière de "se donner une bonne conscience pseudo écologique". C'est cette procédure démocratique que vise à instaurer cette initiative neuchâteloise, mais ce qui vaut pour Neuchâtel vaut évidemment pour tout le pays.
Francis Richard