Considéré comme un genre à part entière de la science-fiction, au même titre que le space opera ou le post-apocalyptique, le voyage dans le temps a marqué la littérature, le cinéma et la bande dessinée : de La Machine à explorer le Temps à Replay,de Terminator à Retour vers le Futur, de Sailor Moon à Quartier Lointain, les récits de voyage dans le temps sont innombrables et explorent toutes les facettes d’un concept totalement fantasmé. Les séries télé ne sont pas en reste, et recyclent en permanence ces idées de boucles temporelles, de projections dans le futur et de tentatives de modification du passé.
Petit tour d’horizon chronologique – mais non exhaustif : n’hésitez pas à mentionner vos références dans les commentaires – de ces explorations temporelles.
Doctor Who (1963-1989, et depuis 2005)
Créée par Sydney Newman et Donald Wilson, diffusée de 1963 à 1989 et depuis 2005 sur la BBC One, Doctor Who est à ce jour la plus longue série de science-fiction du monde. Elle met en scène les aventures du Docteur, un Seigneur du Temps (extraterrestre originaire de la planète Gallifrey) voyageant à bord d’un TARDIS (Time And Relative Dimension In Space). Machine à voyager dans le temps mi-vivante, mi-mécanique, le TARDIS a l’apparence extérieure d’une cabine de police bleue et possède de nombreuses propriétés : beaucoup plus spacieux à l’intérieur qu’à l’extérieur, le TARDIS possède un « champ de traduction » capable de comprendre n’importe quel langage, un verrou inviolable, un bouclier de protection, un système gravitationnel propre et un mécanisme de communication universel, permettant notamment de passer des communications téléphoniques à travers le temps et l’espace. Quant au Docteur, capable de se régénérer en changeant de corps à l’approche de la mort, il est très attaché à la Terre et ne se sépare presque jamais de ses compagnons de route, humains pour la plupart.
The Time Tunnel / Au Coeur du Temps (1966-1967)
Créée par Irwin Allen d’après le roman Twists in Time de Murray Leinster, The Time Tunnel met en scène les aventures de deux chercheurs, Tony Newman et Doug Phillips, prisonniers d’un tunnel permettant de voyager dans le temps – le chronogyre – qu’ils ont eux-mêmes inventé. Assistant à des événements passés, de la Révolution française à l’attaque de Pearl Harbor, ou futurs, sans pouvoir modifier le cours de l’Histoire, sautant d’une période à l’autre sans jamais parvenir à regagner leur époque, Tony et Doug sont épaulés par leurs collègues, qui se démènent pour les faire revenir. The Time Tunnel s’acheva au bout d’une saison et 30 épisodes.
Planet of the Apes / La Planète des Singes (1974)
Succédant au film de Schaffner (1968) avec Charlton Heston et Roddy McDowall, lui-même adapté du roman de Pierre Boulle paru en 1963, les 14 épisodes de la série La Planète des Singes furent diffusés entre septembre et décembre 1974 sur CBS. Dystopie mettant en scène les malheurs du colonel Alan Virdon, du major Peter Burke et du navigateur Edward Jones, tous trois membres de l’engin spatial Dédale parti de Terre le 19 août 1980, La Planète des Singes raconte comment, après avoir traversé une brèche de l’espace temps à la vitesse de la lumière, ils atterrirent en catastrophe sur une planète inconnue en l’an 3085. Peuplée d’humains réduits en esclavage par des singes très évolués, cette planète n’est en réalité autre que la Terre, et le récit propose avant tout un regard critique sur notre propre société. Faute d’audience et de budget, la série fut annulée au terme de sa première saison.
Quantum Leap / Code Quantum (1989-1993)
Créée par Donald P. Bellisario (Supercopter, Magnum, JAG, NCIS) et diffusée de mars 1989 à mai 1993 sur NBC, Quantum Leap raconte les voyages dans le temps du scientifique Samuel Beckett (Scott Bakula). Titulaire de six doctorats, notamment en physique quantique, médecine, astrophysique et langues anciennes, Sam Beckett crée un prototype d’accélérateur temporel ; impatient de tester sa machine, Sam se retrouve bel et bien dans le passé, mais dans le corps d’une personne dont il prend temporairement l’apparence. Ce n’est qu’après être intervenu dans la vie de cette personne et avoir réglé des problèmes qui lui sont étrangers qu’il pourra à nouveau changer de corps et de période, sans jamais, toutefois, maîtriser le processus et regagner son époque. Il est aidé dans sa tâche par Al, un homme du présent que Sam ne peut voir que sous la forme d’un hologramme, véritable ressort comique de la série. Reconstitution du passé récent des États-Unis – Sam incarnera ou côtoiera des figures comme Lee Harvey Oswald, Elvis Presley, et sera tour à tour membre du Ku Klux Klan, condamné à mort ou prêtre -, interrogation sur la religion, Quantum Leap regorge de références littéraires et cinématographiques.
Early Edition / Demain à la Une (1996-2000)
Créée par Ian Abrams, Patrick Q. Page et Vik Rubenfeld, Early Edition est inspirée d’un film de René Clair, C’est arrivé demain (tourné en 1944 à Hollywood sous le titre It Happened Tomorrow). La série est construite autour du personnage de Gary Hobson, ex-agent de change à Chicago, mis à la porte par son épouse et installé dans un hôtel, le Blackstone. Réveillé chaque matin par les miaulements d’un étrange chat roux surnommé « le chat de Mr Snow », il reçoit invariablement à 6h30 un exemplaire du Chicago Sun-Times… du lendemain. Aidé de Marissa, une amie aveugle, et du vieux Chuck, qui l’aidera durant les deux premières saisons, Gary tente de faire le bien et de prévenir les catastrophes à venir. Alors même que Gary se retrouvait sans repères sociaux, sentimentaux ni professionnels, le voilà transformé en une sorte de super-héros malgré lui, condamné par une conscience de quasi boy scout à prendre soin des autres jour après jour. A noter : Kyle Chandler, l’interprète de Gary Hobson, incarnera dix ans plus tard (à partir de 2006) le coach Eric Taylor dans la série Friday Night Lights.
Seven Days / Sept Jours pour agir (1998-2001)
Créée par Zachary et Christopher Crowe en 1998, Seven Days fut diffusée sur UPN durant trois saisons et 66 épisodes. Le pitch : dans le désert du Nevada, à partir des technologies extraterrestres retrouvées à Roswell, une base secrète a développé une machine, la Chronosphère ou Backstep Sphere, capable d’envoyer un homme dans le passé dans le but de modifier le cours de l’histoire et d’éviter les catastrophes à venir. Frank Parker, un ancien soldat, est envoyé sur une mission très particulière : passer sept jours dans le passé pour améliorer l’avenir. Parker parviendra tout de même à sauver le Président des États-Unis, à empêcher la propagation du virus Ebola, à éviter une guerre entre la Corée du Nord et la Corée du Sud, à déjouer une attaque nucléaire… en seulement sept jours. Alors, Frank Parker ou Jack Bauer ?
Odyssey 5 (2002-2004)
Créée par Manny Coto (Star Trek Enterprise, Taken) et diffusée entre 2002 et 2004 sur Showtime, la série met en scène les péripéties de cinq membres de l’équipage de la navette spatiale américaine Odyssey, témoins de la destruction de la Terre le 7 août 2007. Secourus par une étrange créature appelée « le Quêteur », les membres de l’équipage sont renvoyés cinq ans en arrière pour découvrir la cause de la catastrophe, et tenter de l’éviter.
Mais ils vont très vite s’apercevoir qu’on ne joue pas si facilement avec le passé, qu’il soit question de leurs vies personnelles ou de la survie de l’humanité. Faute d’audience suffisante, la série sera annulée au bout d’une saison (20 épisodes).
Tru Calling (2003-2005)
Diffusée sur la Fox entre 2003 et 2005, Tru Calling met en scène le personnage de Tru Davies (incarné par Eliza Dushku, alias Faith dans Buffy), une étudiante en médecine employée à mi-temps dans une morgue. Appelée à l’aide par les cadavres qui l’entourent, Tru revit alors sa dernière journée et met tout en œuvre pour leur sauver la vie. Malgré un schéma assez balisé – Tru entend l’appel à l’aide, se réveille dans son lit et vérifie qu’elle revit bien sa précédente journée avant d’entreprendre de sauver le futur cadavre -, la série tente de ne pas se laisser enfermer dans sa propre formule et apporte un soin tout particulier aux intrigues. Une série pas franchement révolutionnaire, qui fut annulée au bout de deux saisons, mais qui eut notamment le mérite de nous faire découvrir Zach Galifianakis avant ses rôles dans Into The Wild, Very Bad Trip et Bored to Death.
Day Break (2006)
Créée par Rob Bowman et Paul Zbyszewski, Day Break fut annulée au bout de 13 épisodes, et seuls les six premiers furent diffusés sur ABC entre novembre et décembre 2006. Recyclant une nouvelle fois le thème du Jour sans Fin, la série raconte les mésaventures de l’inspecteur Brett Hopper. Accusé du meurtre du procureur Garza, Hopper réalise qu’il a été piégé et que sa famille est en danger ; chaque matin, c’est la même journée qui recommence, le confrontant sans cesse aux conséquences de ses choix, et le « condamnant » à découvrir la vérité pour que cesse le cauchemar. Chaque épisode est construit sur le mode du « what if » : « What if they run » (1.02), « What if he lets her go » (1.03), « What if he can change the day » (1.04), « What if they’re stuck » (1.05), etc. La série fut diffusée sur France 4 en 2009.
Journeyman (2007)
Créée par Kevin Falls et Alex Graves, et diffusée sur NBC entre septembre et décembre 2007 – une saison de 13 épisodes -, Journeyman met en scène Dan Vasser, un journaliste de San Fansisco qui mène une vie heureuse avec sa femme et son jeune fils, jusqu’au jour où il découvre qu’il peut voyager dans le temps et modifier la vie des gens. Incapable de décider du moment où surviennent ces « bonds », il en est averti quelques instants avant par de violents maux de tête, qui deviendront de moins en moins douloureux au fil du temps. Au cours d’un bond dans le passé, Dan retrouve Livia Beale, sa fiancée décédée dans un mystérieux crash aérien. Pourra-t-il la sauver ? Quelles conséquences ses voyages dans le temps auront-ils pour sa famille ? Les choses se compliquent lorsque Dan comprend que Livia peut elle aussi voyager dans le temps, et qu’elle censée vivre en 1948 : leur rencontre était en réalité le fruit d’un bond de Livia vers le futur, la jeune femme ayant visiblement été appelée pour porter secours à Dan.
Life On Mars (2006-2007)
Série britannique de deux saisons et 16 épisodes, Life On Mars raconte l’histoire peu commune de Sam Tyler, commissaire principal à Manchester en 2006 : peu de temps après que sa fiancée ait été enlevée par un tueur en série, Sam est renversé par une voiture et se réveille en 1973, dans un monde où ses méthodes – Sam est devenu inspecteur – sont considérées comme ultra modernes. Le titre de la série est issu de la chanson éponyme de David Bowie, chanson que le personnage principal écoute au moment de son accident. Chaque épisode débute par un monologue de Sam : « My name is Sam Tyler. I had an accident and I woke up in 1973. Am I mad, in a coma, or back in time ? Whatever’s happened, it’s like I’ve landed on a different planet. Now, maybe if I can work out the reason, I can get home.”
Les résultats d’audience, très bons, conduisirent la BBC One à commander un spin-off de Life On Mars : Ashes To Ashes fut diffusée entre février 2008 et mai 2010, et reprend peu ou prou le thème ; impossible cependant d’en donner le pitch sans dévoiler une partie de l’intrigue de Life On Mars…
FlashForward (2009-2010)
Beaucoup moins réussie que les deux séries précédentes, FlashForward, créée par Brannon Braga et David S. Goyer d’après le roman éponyme de Robert J. Sawyer, bénéficiait pourtant d’une idée de départ plutôt prometteuse : un black-out planétaire de 2 minutes et 17 secondes provoque un chaos sans précédent ; au cours de ce laps de temps, chaque personne a découvert, par le biais d’une vision mystérieuse, ce qu’il adviendrait d’elle six mois plus tard. Une perspective qui va bouleverser l’ordre des choses… Présentée par ABC comme le digne successeur de Lost, et malgré un épisode pilote rondement mené, la série s’enferme rapidement dans des rebondissements trop prévisibles et des storylines secondaires sans grand intérêt.
N’est pas Lost qui veut, et si je n’ai volontairement pas mentionné plus tôt dans cette note la spécialiste ès boucles temporelles, ce n’est que pour mieux vous renvoyer à présent vers un article extrêmement complet sur la question : « Comprendre les boucles temporelles » par Thomas Sinaeve, dans le cadre de la « Lost Week » organisée sur le blog de Pierre Sérisier, Le Monde des Séries, en janvier 2010.
Et pour ceux qui voudraient vraiment se préparer à un voyage dans le temps, le site Slate.fr propose quelques précieux conseils, dans un article intitulé « Le voyage dans le temps pour les nuls ».