Mental Archaeology, au Credac d'Ivry-sur-Seine

Publié le 20 octobre 2010 par Onarretetout

Faut-il que l’art raconte des histoires ?

L’exposition que l’on peut voir au CREDAC d’Ivry-sur-Seine le laisse penser. Mais les histoires peuvent être celles que les visiteurs vont créer eux-mêmes.

Ainsi, en rapprochant les œuvres de Thea Djordjadze et celles de Jean-Luc Moulène, on peut voir dériver une pierre en équilibre instable et se mettre à penser à cette phrase de Francis Ponge : « Aussi bien, le galet est-il exactement la pierre à l’époque où commence pour elle l'âge de la personne, de l'individu, c'est-à-dire de la parole. » La pierre posée sur une sorte de tapis rectangulaire à qui elle interdit le vol (de Thea Djordjadze), celle-là même qui roule de photo en photo autour de la salle consacrée à Jean-Luc Moulène, serait pierre de toute éternité, bien avant la parole, bien avant la naissance des temps. Et tout est si fragile dans ces salles dont le sol est incliné, comme si on en avait exhumé les objets énigmatiques qui ont peut-être eu une utilité : grille, matelas, montres, table, bouteille, code du travail, porte dégondée…

Dans un autre espace, le travail de Matti Braun est présenté d’une manière presque classique ; ce serait une exposition ethnographique, archéologique, présentant dans des vitrines des objets extraits de l’histoire d’une ville. Nous sommes dans la situation d’un visiteur de musée, mais les objets révèlent une histoire moins physique qu’il n’y paraît.

   

Le bassin est vide, les lampes à huile ouvrent un bec qui rappelle la bouche des carpes, tandis que les pigeons tiennent le leur fermé attendant peut-être leur nouvel acquéreur sur le marché d’Urfa, ville associée à la Bible puisqu’on dit qu’elle est à l’emplacement de l’Eden, qu’y seraient donc passés Adam et Eve, qu’elle a vu naître Abraham… Les pellicules d’un film de Yilmaz Güney, des photos évoquant d’autres artistes permettent au visiteur de ne pas rester enfermé dans cette lumière verte mais d’en ressentir le rayonnement et les soubresauts d’un passé qui n’est pas passé.

L’exposition est visible jusqu’au 19 décembre.

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