Les Éditions de la revue Conférence viennent de publier La Voie verte, du poète suisse Pierre-Alain Tâche.
Vers le soir
A chaque jour suffit sa joie.
Vers le soir, un landau m’infligea
la vision du visage d’un enfant mort
− poupée au masque terrifiant.
Puis, vint l’obscurité propice.
En remontant jusqu’aux Berthets,
je m’attendais aux plaintes du renard ;
c’est un âne que j’entendis
braire sans fin pour un peu d’aide :
il pompait l’encre de la nuit.
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Le bief de la Ruine
L’eau sombre de l’imaginaire abonde
au bief de la Ruine, où j’ai vu
des farandoles de calcaire, entre les rives :
corps improbables et figés,
lovés dans les marmites d’un enfer
où rien ne trouble leur sommeil.
Mais quand le flux glacé, soudain,
remonte dans la gorge abrupte du mérou,
qui sommeille, en amont, sous la roche,
il est trop tard pour fuir
et le mauvais rêve, alors, nous rejoint
au bord du vide où, dans l’écrin,
brillent encore pour nous
de purs joyaux, bientôt noyés.
•••••
Dans le coteau
Braille des pierres, dans le coteau !
Les doigts peinent à déchiffrer,
s’égarent, sous les chênes verts,
au fond de ces fouillis où je ne saisis rien
de ce qui court, sur la crête, et se perd
dans la bouche étroite des sources.
D’où je suis, faisant face, il est question
d’un surcroît d’ombre sur la ligne,
où les baies sanglantes des alisiers
ponctuent le dernier chant de l’été.
Le jour qui les verra tomber, tout sera dit.
Aucun mystère, alors, à syllaber
Pierre-Alain Tâche, La Voie verte, Éditions de la revue Conférence, 2010, pp. 29, 31 et 36.
Bio-bibliographie de Pierre-Alain Tâche
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