Récemment j'ai écouté l'émission "l'euro est-il voué à disparaître", sur DailyMotion - cf. ci-dessous.
Quelques personnalités y débattent de l'avenir de l'euro. Il est déjà intéressant, en soi, que le débat ait lieu sur France3, une chaîne nationale.
Nicolas Dupont-Aignan y a été bon sur la nécessité de sortir de l'euro. L'argumentation des défenseurs de l'euro (Elisabeth Guigou, Agnès Bénassy-Quéré et Daniel Cohen) a été souvent laborieuse.
Surtout, sur un élément essentiel du débat, Daniel Cohen a prononcé une contre-vérité assez hallucinante. Sur la troisième vidéo du débat, à partir de 1'53", on l'entend expliquer que la zone euro n'a aucun problème de croissance et qu'elle fait, notamment, mieux que les Etats-Unis.
Ca me gêne profondément. J'ai l'habitude d'entendre les partisans de l'Union raconter des conneries, mais à ce point, ça me stupéfie.
Cohen est prof d'économie à Normale Sup, membre du Conseil d'Analyse Economique, éditorialiste au Monde, président du Conseil scientifique de la fondation Jean-Jaurès... Aucun de ces titres ne m'impressionne en soi, mais ils confèrent à celui qui peut s'en parer une sorte d'autorité morale dont, en retour, on peut espérer qu'il sache se rendre digne. Il est facile à quelqu'un qui s'avance introduit par de telles pelisses de faire avaler n'importe quelle fadaise à ses auditeurs. Habituellement des personnalités d'un tel calibre s'en abstiennent.
Pour retourner donc à la croissance comparée de la zone euro et de celle des Etats-Unis, une simple visite sur le site d'Eurostat permet de constater un fait massif : depuis 1996, la croissance moyenne de la zone euro est de 1,6% par an (que l'on prenne un euro à 15 ou 16 membres), celle de l'Union européenne à 27 est de 1,8% et celle des Etats-Unis, enfin, est de 2,5%.
Pour l'année 2010, Eurostat donne la zone euro à 1,5% dans le meilleur des cas, les Etats-Unis à 2,5%.
Sur les quinze dernières années, la croissance de la zone euro n'a été supérieure à celle des Etats-Unis que quatre fois, trois fois pendant le deuxième mandat de Bush fils notamment.
Mieux, la croissance de l'Union européenne à 27 a toujours été, sauf une fois, supérieure à celle de la zone euro.
Tous ces rappels laborieux pour expliquer que, par quelque bout qu'on les prenne, les chiffres montrent que l'appartenance à la zone euro s'apparente plus à un boulet qu'à un atout, au moins en termes de croissance.
Que Daniel Cohen n'ait pas eu l'hônneteté de reconnaître que cela pouvait être un sujet de débat, qu'il ait même affirmé l'inverse, est ennuyeux pour la qualité du débat démocratique.
J'aurais sans doute laissé tomber sur ce point - je n'éprouve aucune animosité à l'égard de Daniel Cohen - mais l'entendant ce matin, sur France Inter, invité et interrogé par Pascal Paoli pour défendre l'Europe, je me suis dit qu'il serait bon de signaler, à qui voudra bien l'entendre, que Daniel Cohen souffre d'un biais cognitif à l'égard des questions européennes.
Il n'est jamais mauvais, non plus, de rappeler que selon les partisans de l'Union européenne, les détracteurs de cette invention diabolique sont des menteurs et de incultes.
Une seule chose est sûre, pour revenir à cette émission, Daniel Cohen n'est pas inculte.
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