17 - 10
2010
Pitch.
Dans le sud de la France en 1974, accusé d'avoir kidnappé et assassiné une fillette de 9 ans, Christian Ranucci, qui avait eu un accident de voiture à quelques brasses des lieux du crime, est condamné à mort sans preuves véritables deux ans plus tard.
Un jeune homme de 20 ans, accusé sans preuves véritables d'avoir enlevé et tué une fillette, sera guillotiné deux ans plus tard dans la France de Giscard qui refusera de le gracier alors qu'on le supposait plutôt défavorable à la peine de mort. Mais avant l'affaire Ranucci, venait d'avoir lieu l'affaire Patrick Henry et les français, alors favorables aux deux tiers au maintien de la peine de mort, voulaient un exemple... Aujourd'hui encore, subsiste un doute mais la thèse de l'innocence de Christian Ranucci, défendue par Michel Drach dans son film, est prédominante.
En juin 1974, dans une cité du sud de la France, Elisa Garcia, une petite fille qui jouait avec son frère, est invitée par un type en pullover rouge à monter dans sa voiture, une Simca 1100 grise, afin de l'aider à chercher son gros chien noir, elle disparaît. Au même moment, Christian Ranucci, représentant de commerce à Nice depuis un mois (il vient de faire son service militaire), a un accident à un carrefour à 20 km de Marseille, téléscopant la voiture du couple Garnier, il prend la fuite mais les Garnier notent le numéro d'immatriculation, c'est une Peugeot grise. Quelques jours plus tard, on retrouve le cadavre de la petite Elisa, égorgée, pas loin des lieux de l'accident de voiture de Ranucci. Dans l'intervalle, les parents d'Elisa ont porté plainte à la police, le frère de la victime, passionné de voiture et un garagiste voisin attestent qu'elle est bien montée dans une Simca 1100, et jamais ils ne reconnaîtront Ranucci dans les confrontations. Reste le ménage Garnier dont les témoignages vont évoluer avec le temps, après plusieurs confrontations, ils vont reconnaître Ranucci et témoigner qu'il transportait un gros paquet en fuyant...
photo Gaumont
Pour son malheur, Ranucci, qui a toujours déclaré avoir passé la nuit, veille de l'accident, dans des bars de Marseille à prendre une cuite, s'était réveillé le lendemain, à l'arrière de sa voiture, dans la champignonnière d'un paysan, ayant tout oublié. Une propriété privée située pas loin du lieu du crime. La mère de Ranucci, qui entretient avec son fils une relation fusionnelle, déclare que c'était la première fois qu'il ne dormait pas chez eux, au procès, on découvrira que la mère et le fils ont déménagé dans le passé multe fois fuyant la violence du père qui avait notamment blessé sa femme de coups de couteaux. Arrêté, Ranucci passe aux aveux après près de 20 heures d'interrogatoire, il se rétractera ensuite, trop tard, disant qu'il a été torturé par la police. Mais l'avocat stagiaire commis par Paul Lombard, grand ténor du barreau de Marseille, se souvient encore aujourd'hui de sa première visite à la prison : Ranucci dit qu'il pense être coupable puisqu'il les témoins l'ont vu...
Bien qu'une dame ait déclaré à l'époque que sa petite fille avait aussi été ennuyée par un homme au pullover rouge qui voulait la faire monter dans sa voiture pour une histoire de gros chien noir, son témoignage a disparu, on le retrouve à quelques heures du verdict lors du procès deux ans plus tard, l'avocat général ayant déjà demandé la peine de mort, fait exceptionnel, contrairement à l'avocat de la défense... Ce pullover rouge innocentant Ranucci sera occulté, les deux témoins ayant reconnu la Simca 1100 du type au pullover rouge, le petit frère d'Elisa Garcia et le garagiste, ne seront pas cités. Mais Ranucci, selon l'avocat Lombard, a commis des erreurs fatales : passer aux aveux dans un premier temps, être incapable de se souvenir de ce qu'il a fait la veille de l'accident, être odieux aux Assises, se mettant à dos les jurés.
photo Gaumont
Le film dénonce le rôle de la presse qui fait monter la sauce, omniprésents, refaisant l'enquête, les uns pro-Ranucci, les autres anti, de l'opinion publique qui demande la tête de Ranucci, de la justice représentée par une juge obtuse qui pense surtout à être valorisée qu'elle travaille vite, de la police qui craint la presse et les politiques et veut du résultat à tout prix.
Hormis une toute petite scène onirique s'invitant au procès avec le rêve d'une petite fille en blanc et de Ranucci redevenu gamin, la mise en scène est classique, efficace, démontrant comment le piège se referme sur Ranucci, que le réalisateur fait passer intelligemment de suspect à victime. Bien que l'image date, très années 70 et les costumes, les coiffures aussi, les cheveux longs d'un inspecteur qui ressemble à Peter Fonda jeune, la robe orange de la mère de Ranucci, etc... le film est moderne, à la fois démodé et moderne à cause de son sujet : la France d'avant l'abolition de la peine de mort, la construction d'un évènement par les médias, l'intervention des politiques dans la justice, les préjugés, la soif de vengeance pour l'insupportable des crimes pédophiles.
Le film de Michel Drach, adapté du roman de Gilles Perrault, qui défendait la thèse de l'innocence de Christian Ranucci, exécuté à 22 ans en juillet 1976 dans la cour de la prison des Baumettes à Marseille, est plus que crédible jusqu'au moment où.... l'on découvre qu'il existe un document paru en 2006, "Autopsie d'une imposture" du commandant de police Gérard Bouladou, qui, après une enquête minutieuse, démonte entièrement la thèse de Perrault...
"Le Pullover rouge" (1979), "Guy de Maupassant" (1982) de Michel Drach
DVD et Blu-ray Gaumont, sortie le 12 octobre 2010.
Bonus "Le Pullover rouge" : documentaire avec les témoignages de l'écrivain Gilles Perrault et de l'avocat (JF Le Forsonney) qui était à l'époque le stagiaire de Maître Lombard chargé de défendre Christian Ranucci.
Bonus "Guy de Maupassant" : entretiens avec le fils de Michel Drach, sa co-scénariste et la comédienne Véronique Genest.
Note CinéManiaC :
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Mots-clés : CinéDVD, cinéclassic, cinéma français, Le Pullover rouge, Michel Drach