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Avec «Allah nitché», le 4ème album de leur carrière, les Galliets, groupe zouglou des années 1990, est de retour. En marge de la sortie de l’album, Ali, B.M. et Cyblo nous ont reçus pour une fois, sans Abou, le 4ème membre…Qui n’a pas en mémoire un petit bout de la chanson «Sénégal 92» des Galliet ? Ou encore de «Samedi soir» ? Eh bien, le groupe zouglou d’essence traditionnelle, révélé au public en 1992 (en faveur de l’épopée victorieuse des Eléphants en Coupe d’Afrique des nations) est resté égal à lui-même, 18 ans après ! L’âge de la majorité aussi pour cette formation qui ressort du bois sacré avec «Allah nitché» (Dieu merci, ndlr). Quatrième album de ces quatre mousquetaires qui n’ont d’armes que leurs voix. Et leur musique qui trempe furieusement dans la tradition. Dans une fusion parfaite entre rythmes maouka et gnamboua. Et même s’il est fait à l’honneur de Dieu, l’album qui appelle à la cohésion nationale, montre, sur un autre plan, que le groupe n’a pas cédé à la nouvelle tendance zouglou avec des titres de plus en plus tournés vers l’électro. L’ambiance trash, pour une éventuelle ouverture vers l’extérieur… La joie, l’entente, la paix, l’amour… les principaux thèmes de prédilection du groupe sont revisités au fil des chansons sous un angle nouveau. Mais, si avec «Allah nitché», les Galliet entendent prouver qu’ils sont encore là, il y a cependant une chose avec laquelle ils ne seront jamais d’accorddans la sphère zouglou. Disons, plus généralement, dans la musique : le leadership dans les groupes. C’est pourquoi, chez eux, il n’y a pas de lead vocal. Et pour faire plus simple, tout le monde chante et fait les chœurs à la fois ! Leur solidarité, source de la longévité du groupe, ils la doivent en partie à cette philosophie qui veut que chaque membre joue sa partition dans la même chanson. Aussi, le nouvel album n’a pas dérogé à cette règle sacro-sainte règle. Même lorsque l’un d’eux manque à l’appel, son absence n’est pas durement ressentie. Comme récemment, lors du voyage d’Abou en France pour une urgence…Depuis leur antre d’Abobo (au maquis l’Etat Major) où ils se retrouvent pour se rafraîchir les idées, il a quand même fallu dix bonnes années aux Galliets pour pondre un album complet, digne de leur rang. Ce qui n’était pas donné pour ces garçons avec leurs obligations respectives du moment. Et dire qu’il y a près de 20 ans, lorsque Cyblo et Abou, (alors au Lycée) se retrouvaient pour créer le groupe, c’était la croix et la bannière ! A l’époque, Ali et B.M., encore dans le wôyô, s’époumonaient pendant les cérémonies au quartier pour d’hypothétiques cachets. Et même quand les trois frères de sang (Abou, Ali et B.M.) et Cyblo se sont retrouvés pour former le quatuor les Galliets, (les grands, en bété), il fallait encore marcher d’Abobo à Anyama pour les séances de répétition. Leur persévérance a fini par payer. Puisque leur tout premier album «Sénégal 92» les avait déjà mis sur la pente ascendante, avec leurs fameux boubous. Ensuite, il y a eu «Sama Lolo» en 1999. Puis, «Samedi soir» en 2000. La guerre les avait quelque peu mis sous l’éteignoir. Ils se contentaient de singles patriotiques (ils en ont produit trois, entre 2000 et 2010). Mais, «Allah nitché» marque aujourd’hui le retour des «grands». Avec une promo à double vitesse. Il y a d’abord eu une première sortie VIP de l’album pendant un mois. Suivie de la sortie grand public, depuis le jour du Ramadan. Un jour symbolique, choisi à dessein. Comme pour solliciter une ultime bénédiction d’Allah pour la bonne tenue du disque sur le marché. Mais en attendant une réponse divine, les Galliets savent qu’il faudra que leurs vœux soient d’abord exaucés ici, par les mélomanes. Et c’est tout le mal qu’on leur souhaite !François Yéo[email protected]