Après une quarantaine de pages, j’ai failli renoncer à la lecture du dernier livre de Mohamed NEDALI.
La foultitude de personnages m’a donné le tournis et je ne voyais pas très bien comment l’auteur allait nous mener à « LA MAISON DE CICINE » qui donne son nom au roman paru chez les éditions LE FENNEC en février 2010.
C’est alors qu’une critique dans notre LIBERATION national m’est alors revenue à l’esprit, où il était question de plagiat de la part de Nedali, de recours à des lieux communs ou encore à diverses erreurs syntaxiques et même socialogiques. Bref, le journaliste démolissait méthodiquement le livre.
Fervent admirateur de Mohamed NEDALI, je me suis dit qu’il fallait absolument que je termine ma lecture pour m’en faire une idée circonstanciée.
Une fois ma lecture relancée, la suite du roman m’a emballé !
Certains passages comme les pages sur la catastrophe qui a ravagé la vallée de l’Ourika en 1995, la mise en place par le gourou islamiste de son pouvoir sur les habitants de la « maison de Cicine » sont d’un réalisme digne des grands écrivains.
On a reproché à Mohamed Nedali d’avoir plagié « L’immeuble Yacoubian » de l’égyptien Alaa Al-Asawani. Il se trouve que l’Egypte n’a malheureusement pas le monopole des maisons, prévues pour une famille, et qui en abritent des dizaines. Toutes les médinas du Maroc connaissent ce phénomène que notre auteur décrit avec un réalisme et une acuité remarquables.
On a reproché à Mohamed Nedali d’avoir puisé chez Yasmina Khadra l’inspiration de la fin de son roman. Des islamistes agressant de simples citoyens, au couteau, au feu ou par d’autres moyens, pour la simple raison qu’ils les considèrent comme impies ne relève pas de l’exception, nous le savons tous et Nedali l’écrit !
On a reproché à Mohamed Nedali son misérabilisme parce qu’il met en scène des petites gens, qui vivent comme le petit peuple, qui parlent comme les gens de la rue. Il est vrai que certains passages, une fois ramenés à l’arabe, peuvent choquer. Mais pourquoi nous voiler la face : le parler populaire marocain est cru. Le refuser c’est refuser hypocritement la réalité.
« La maison de Cicine » n’est peut-être pas le meilleur roman de Mohamed Nedali. Quelques longueurs l’alourdissent inutilement tout comme la pléthore de personnages. Mais cette œuvre s’inscrit parfaitement dans le style réaliste de l’auteur et dans sa démarche romanesque.
Ce roman n’est surement pas destiné à des lecteurs en mal d’exotisme, mais à des marocains qui connaissent bien le Maroc et les marocains, avec leurs défauts, leurs aspirations, leurs problèmes et leur génie propre.
Mohamed Nedali continue à exercer son métier de professeur dans un village de l’Atlas : il aurait pu choisir, comme tant d’autres, d’autres cieux plus accueillants à la « littérature exotique ».
LA MAISON DE CICINE est à lire ! Oui, à lire !