On croit toujours Woody Allen au sommet de son art. Puis on se sent chaque fois contredit à la sortie d’un nouveau film. « Vous allez rencontrer un bel et sombre inconnu » ne déroge pas à la règle : les dialogues sont d’un délice absolu, le scénario bien ficelé, les coups de théâtre au rendez-vous. Et les situations toujours aussi tordues. C’est même plus efficace que « Whatever works », qui traînait parfois en longueur.
Comme à l’habitude, Woody livre une brochette de personnages emmêlés dans les fils de la vie : Sally est une jeune femme mariée avec un écrivain en quête d’inspiration, monopolisée par sa mère, elle-même obsédée par les prédictions plus ou moins douteuses d’une voyante, et cela d’autant plus depuis que son mari l’a quittée pour se remarier avec une call-girl. Chacun, dans sa recherche d’une vie meilleure ou moins pire, virevolte d’échecs en espoirs de réussites. Malgré tous les entrecroisements, on arrive à s’y retrouver, et le passage d’une histoire à l’autre nous tient en haleine.
C’est moins acide que « Match Point » ou « Scoop », pas vraiment de manipulateur masqué ici, et donc moins de suspens. Mais la même lucidité est toujours présente, et le même talent à transformer les situations les plus catastrophiques en tableaux hilarants. Après avoir vu le film, vous prierez sans doute pour que votre mère n’aille jamais voir une voyante de sa vie. Le message est clair : on s’illusionne tous et on illusionne tous les autres ! Heureusement que c’est de la fiction – si vous trouvez une ressemblance avec le réel de votre vie, une remise en question est éventuellement à envisager. Donc oui c’est bien ça, nous allons tous nous remettre en question.
La seule prédiction que vous pouvez croire, c’est que vous allez rencontrer… une belle et lumineuse comédie.
Vous allez rencontrer un bel et sombre inconnu.
En salle depuis le 6 octobre.
De Woody Allen
Avec Naomi Watts, Josh Brolin, Antonio Banderas
1h38