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De la propriété intellectuelle

Publié le 13 octobre 2010 par Copeau @Contrepoints

Ce texte est inspiré d’un essai publié sur Libertarian Nation.

Dans un monde libre, il ne peut y avoir de droits de propriété intellectuelle.

De la propriété intellectuelle
Les droits de propriété intellectuelle, tels que les brevets, marques déposées et droits d’auteurs, sont en fait des monopoles décrétés par l’État. Ils permettent à des individus ou à des entreprises d’obtenir un privilège de l’État leur permettant de se soustraire à la concurrence et donc de tricher au jeu du libre-marché. La propriété intellectuelle est donc un ennemi du capitalisme.

La réalité est qu’on ne peut attribuer un droit de propriété à une idée. Les idées sont véhiculées à l’intérieur de notre cerveau et ce qui se trouve là nous appartient, tout comme ce que nous fabriquons de nos mains avec nos outils et notre matière première. Personne ne peut revendiquer être propriétaire d’une idée et restreindre l’utilisation que nous faisons de cette idée avec le fruit de notre travail et de nos ressources.

Supposons que j’écrive un poème publié dans un journal, que vous le lisez et le mémorisez. Il est donc stocké dans votre cerveau et je ne peux rien faire pour vous en empêcher.

Ensuite, vous utilisez un stylo qui vous appartient pour écrire ce poème sur un bout de papier qui vous appartient aussi. Il ne fait aucun doute que le fruit de ce travail vous appartient. Si c’est le cas, comme toute propriété, vous pouvez échanger ce bout de papier, le vendre, le publier, ou faire quoi que ce soit qui vous plaise avec celui-ci. Prétendre le contraire équivaudrait à affirmer que vous n’êtes pas propriétaire du fruit de votre travail, et donc que vous êtes un esclave. Personne ne peut revendiquer être propriétaire de ce bout de papier, ni vous dire ce que vous pouvez ou ne pouvez pas faire avec celui-ci.

Les idées ne sont pas une ressource limitée; c’est-à-dire qu’en mémorisant ce poème, vous ne m’enlevez absolument rien. Même si un million de personnes lisaient et mémorisaient le poème, ma propriété ne serait pas négativement affectée, ni s’ils l’écrivaient sur un bout de papier et le vendaient à une autre personne. Il n’y a donc aucune raison pour qu’un mécanisme légal restreigne l’utilisation des idées en leur assignant des droits de propriété. D’ailleurs, les entreprises utilisent la propriété intellectuelle pour générer un effet de rareté artificielle. Cette rareté, même si artificielle, nous appauvrit tous au profit du détenteur du brevet ou droit d’auteur ou de la marque de commerce déposée.

L’innovation et la création

Certains diront que les droits de propriété intellectuelle sont nécessaires pour encourager l’innovation et la création artistique. Cependant, un très grand nombre d’inventions révolutionnaires et d’œuvres d’art grandioses ont été réalisées dans un environnement où la propriété intellectuelle n’était pas protégée.

Prenons Shakespeare par exemple, qui n’a jamais écrit un scénario original, seulement que des adaptations d’histoires écrites par d’autres. Et que dire des compositeurs tels que Bach et Tchaïkovski, qui ont incorporé les compositions d’autres artistes dans leurs œuvres. Ce genre d’appropriation a longtemps fait partie du processus de création artistique.

La plupart des chansons sont maintenant disponibles gratuitement sur l’internet grâce aux logiciels P2P. Il me semble que cela n’a pas stoppé la création musicale. Même les artistes les plus « piratés », qui sont aussi les plus populaires, sont propriétaires de fortunes plutôt enviables; vous n’en verrez aucun quêter sur Hollywood Boulevard !

Évidemment, sans le privilège des droits d’auteurs, moins d’artistes pourraient vivre de leur art. Cependant, s’il y a vraiment un public pour leur art et que leur produit est de qualité, leurs albums et billets de spectacles vont se vendre quand même.

Considérez aussi les centaines de milliers de textes publiés sur l’internet, disponibles à tous gratuitement, sans protection. D’ailleurs, à peu près toutes les publications datant d’avant 1900 sont maintenant non-protégées et des éditeurs continuent de les imprimer, de les publier et de les vendre à profit.

Il ne fait aucun doute que l’absence de droits de propriété intellectuelle améliorerait grandement l’accès à la culture.

Il y a aussi l’essor des médicaments génériques, qui n’a pas freiné l’ardeur des compagnies pharmaceutiques à développer de nouveaux médicaments. En fait, l’inefficacité, la lourdeur et la lenteur du système gouvernemental d’approbation des médicaments (FDA) est une bien plus grande source de maux de tête pour ces entreprises.

Certes, le profit potentiel de toutes ces industries (musique, livres, médicaments, etc) serait amoindrit par l’absence de propriété intellectuelle, mais ils seraient quand même là pour justifier l’innovation. Là où il y a du profit potentiel, il y des entreprises pour le réaliser.

L’aspect légal

Disons que je prends le texte d’un livre que vous avez écris, appose mon nom dessus et le commercialise; ou encore disons que je prends un livre que j’ai écris et le commercialise sous votre nom. Dans ces deux cas, ai-je fais quelque chose qui ne respecte pas les droits de propriétés ? Oui, mais pas envers vous ! C’est la propriété des acheteurs du livre que j’ai violée en utilisant une fausse représentation. Je leur ai vendu un produit X dont l’étiquette mentionne que c’est un produit Y. J’ai peut-être une dette morale (et non légale) envers vous, mais la seule violation punissable par la loi est la fausse représentation envers les consommateurs, et non la violation de vos droits de propriété intellectuelle.

Il y a néanmoins d’autres moyens de vous protéger à cet égard : le boycott volontaire. Il y en a eu plusieurs exemples dans l’histoire, mais je préfère celui de Tolkien. La première édition du Seigneur des Anneaux publiée aux États-Unis était une version « pirate » de Ace Books publiée sans l’accord de Tolkien, qui n’a toutefois pas entamé d’action légale contre cette entreprise. Par la suite, la maison Ballantine a publié une version officielle approuvée par l’auteur. Cette version comprenait une note sur la couverture arrière mentionnant qu’il s’agissait de la seule version autorisée et demandant aux lecteurs de ne pas acheter l’autre version de Ace Books. Le boycott volontaire a fonctionné ; les ventes de la version de Ace Books ont chuté jusqu’à ce que la publication cesse. Il est donc possible de contrer le piratage et de faire respecter les « obligations morales » entre auteurs sans utiliser le pouvoir de coercition de l’État.

Les implications

La propriété intellectuelle est utilisée par les entreprises pour bénéficier d’un monopole « légal ». Les Microsoft, Monsanto et Pfizer de ce monde utilisent leurs brevets pour écraser la compétition et dominer leur industrie, tout en oppressant la population. En effet, sans les brevets, les technologies de Monsanto serait offertes par plusieurs entreprises ce qui ferait baisser les prix et réduirait l’emprise de cette corporation sur les agriculteurs ; les médicaments seraient offerts à un prix beaucoup plus bas ce qui augmenterait la qualité de vie de millions d’individus. Évidemment, les marges de profit de ces entreprises seraient plus « normales », telles qu’elles devraient l’être sans ces privilèges accordés par l’État.

Qu’arriverait-il si le Canada abandonnait la protection de la propriété intellectuelle ? Je pense que plusieurs entreprises apparaîtraient (d’ici et d’ailleurs) pour produire des biens et services jadis protégés par les droits de propriété intellectuelle. Ces entreprises nous offriraient ces biens et services à meilleur prix que le monopoliste, ce qui améliorerait notre pouvoir d’achat et, par le fait même, notre qualité de vie.

D’autre part, il y aurait moins de frais légaux et administratifs dépensés pour faire respecter ces droits; moins de poursuites absurdes, moins de bureaucratie.


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