A Marly une curieuse petite place mérite le coup d’œil. A droite la rue Henri Bouilhet qui descend vers le vieux cimetière et à gauche l’avenue du Général Leclerc qui à l’inverse monte depuis la gare vers le vieux Marly et son église Saint-Vigor, dans notre dos. Entre ces deux rues, une maison comme une proue de navire, bien à l’étroit sur le bout de terrain taillé en pointe aigue depuis qu’on a percé l’avenue en son temps.
Le bâtiment blanc à droite de la photo appartient à l’école Blanche de Louvencourt, école privée réservée aux jeunes filles des maternelles et primaires. Construit par un particulier en 1857 pour devenir un asile, le lieu est cédé à la commune en 1861 par son héritière « à condition de faire tenir cette école par des Religieuses, à perpétuité. » De son côté, le marquis de Louvencourt en mémoire de sa fille Blanche décédée à 20 ans, alloue une rente à la ville pour entretenir cet asile « et favoriser l’apprentissage des jeunes filles au sortir de l’école où elles devront continuer à recevoir des leçons d’écriture et de lecture ». Durant plusieurs dizaines d’années ce legs sera source de conflits juridiques en vertu de la séparation des pouvoirs laïques et religieux. Finalement, Blanche de Louvencourt restera une école privée.
A gauche de la photo, cachée par les tilleuls et comme l’indique la camionnette jaune (précieux indice), se trouve la poste alors que derrière nous se trouve l’ancienne propriété d’Alexandre Dumas (fils) aujourd’hui Parc Alexandre Dumas, un lotissement de pavillons de part et d’autre d’une rue privée.
Pour finir, quelques mots sur Henri Bouilhet (1830-1910) qui donne son nom à la rue de droite. Après la mort de son père alors qu’il n’a que sept ans, il est élevé par son oncle Charles Christofle et obtient un diplôme d’ingénieur chimiste. Il entre tout naturellement dans l’entreprise de cet oncle et va participer à l’expansion de celle-ci, devenue depuis l’Exposition de 1839 la première société exportatrice de joaillerie française. La société servira toutes les cours du monde à commencer par Louis-Philippe puis Napoléon III. En 1882 Henri Bouilhet créé le Musée des Arts Décoratifs. Son nom reste indissociable de celui de Christofle, non seulement par les liens familiaux mais aussi par ses talents qui en permirent le développement. Après son mariage en 1856, le couple s’installa à Marly pour « respirer au milieu de la verdure et des fleurs, les senteurs des lilas et glycines. » Tout comme moi, en somme.