Le nombre de gens qui veulent créer leur boite est assez hallucinant. Le nombre de gens qui passent vraiment à l’action est déjà moins mirobolant. Intéressons-nous à ceux-là. Ou celles-là, d’ailleurs. En effet, curieusement, dans mon entourage professionnel et à travers mes contacts, je vois beaucoup plus de femmes que d’hommes qui se lancent dans l’aventure. Parmi mes clients, beaucoup de créateurs viennent me parler de leur problème de communication, de référencement, de marketing personnel… Des gens en évolution, qui veulent changer, qui en ont marre, qui ne supportent plus leur vie professionnelle actuelle, qui se verraient ailleurs, qui ont une idée depuis longtemps, qui somatisent, parfois. Et dont les visages s’éclairent dès qu’on parle projet. Le vrai. Celui qu’ils ou elles ont dans la tête depuis longtemps, ou mieux, celui auquel je les amène, après avoir brassé, écumé et filtré ensemble nos matières grises.
Mais dès qu’on parle de leur projet, j’entends les mots «autoentrepreneur», «portage salarial», «SARL», «statuts», «cotisations sociales», «réduction d’impôts», etc. Ayant rarement l’habitude de détourner les gens de leur appétit créateur, je ne relève pas. Mais je m’empresse, dès que je peux, de leur faire remarquer qu’ils mettent la charrue avant les bœufs. La France est un pays curieux. On veut créer en permanence, et la première chose à laquelle on pense, c’est à se structurer. Louable intention, mais bien éloigné du sujet : entreprendre. Ce n'est pas parce que dans «Auto-entrepreneur», il y a «entrepreneur» qu'il faut se jeter comme un perdu sur un statut qui limite par exemple l'activité de vente de services à un peu plus de 30 000 euros par an. Et qui ne vous apportera strictement aucun client par la simple magie de la prononciation de ce nom.
Imaginons un instant. Vous voulez créer une activité de vente de boutons. Vous en rêvez depuis des années. Vous y pensez la nuit lorsque votre conjoint dort. Vous comptez dessus pour abandonner enfin le boulot qui vous permet tout juste de payer votre F4, votre C4 familiale et les 3 semaines vacances estivales aux Sables-d’Olonne ou au Crotoy. Mais qui vous oblige à supporter le petit teigneux ou l’adjudante pénible qui fait office de N+1...
Je déconseille alors de se préoccuper en premier lieu du statut que vous adopterez, du type de société que vous choisirez ni de la couverture sociale qui vous permettra de changer deux fois de lunettes tous les dix ans. Ce qui doit vous empêcher de dormir (comme ce fut le cas pour moi il y a maintenant 15 ans et c'était juste super...), c’est d’abord de savoir si votre projet va vous plaire à vous, s’il est capable de vous faire lever de bonne humeur tous les matins. Ensuite, il faut voir s’il est viable, comment vous allez faire venir les clients à vous, comment vous allez vendre, à quel prix, etc. Autrement dit, concentrez-vous d’abord sur votre activité, les clients, la vente. Ensuite, et ensuite seulement, vous verrez quel statut adopter.
Vous allez me dire «Oui, mais il faut bien facturer !» Et donc avoir un statut. Sans aucun doute. Vous pouvez faire des notes d’honoraires, des notes de droits d’auteur si vos prestations s’y rattachent. Vous pouvez être en indépendant, profession libérale (il suffit d’aller s’inscrire à la Chambre des Métiers, c’est ce que j’ai fait), comme un avocat ou un médecin. Vous pouvez être entrepreneur individuel (EURL), en portage salarial, que sais-je encore. Toujours est-il qu’il me paraît plus sage d’adopter le statut le moins contraignant. Mais de ne le faire que lorsqu’on est sûr de soi et sûr de son projet. Je ne dis pas, encore une fois, qu’il faut négliger cette phase. Je dis que ce ne doit pas être la première chose sur laquelle vous devez vous concentrez. Mettez toute votre énergie dans votre projet. Vous aurez bien le temps de structurer les choses quand l'abondance sera au rendez-vous.
En complément, vous pouvez lire avec profit la note de Sylvaine Pascual sur les 8 trucs infaillibles pour tuer son auto-entreprise.