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En attendant, difficile d’effacer leur mémoire. D’autant que la voilà ravivée par un sympathique petit livre rouge, format pavé de poche: «Les murs ont la parole: mai 68», réédité chez Tchou, 39 ans après sa première parution.
Dans ce recueil d’inscriptions, les ornements des murs universitaires abondent: «un flic dort en chacun de nous, il faut le tuer» (Censier); «baisez-vous les uns les autres, sinon ils vous baiseront» (Hall Richelieu, Sorbonne) ; «Les murs ont des oreilles. Vos oreilles ont des murs» (à Sciences Po). Grâce à ces graffitis, aux esgourdes des murs d’universités de Paris, s’ajoutaient des becs difficiles à clouer.
L’époque était, décidément, à l’action créative: «ne vous emmerdez pas. Merdifiez», revendiquait un mur de Censier. Mais on ne perdait pas pour autant les vraies raisons d’être à l’avant-garde: «millionnaires de tous les pays unissez-vous, le vent tourne» (Censier), ou encore: «le conservatisme est synonime (sic) de pourriture et de laideur» Grand Hall, Nouvelle fac de médecine). Et à côté de ces écriteaux, ne lisez-vous pas, déjà, les prémisses de la calligraphie moderne: «Jèm ékrir en fonétik» (Censier)?
La libre pensée imprègne les remparts académiques. Les téléphones portables ne sont pas encore nos «compagnons de vie», l’écriture rapide des sms n’est pas un automatisme, mais les étudiants, ces artistes surréalistes, sont catégoriques: «l’orthografe est une mandarine» (Sorbonne).
En feuilletant ce livret, répertoire de paroles emmurées, on retrouve bien sûr ce trait d’esprit célébrissime: «Soyez réalistes, demandez l'impossible», car «exagérer, c’est commencer d’inventer» (Censier – on était particulièrement inspiré, à Censier).
Guettons donc la liquidation à venir de cet événement historique, mais pour l’instant, savourons 2007 en tournant les pages de ce «Journal mural» avec le sourire. ( Vérane Noël - BibliObs )
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