Roman - 150 pages
Editions Mercure de France - juin 2010
Ce premier roman de Douna Loup touche en plein cœur et surprend par la beauté de son écriture. Paradoxalement, les descriptions de la chasse sont extrêmement sensuelles, animales mais poétiques. Toute l’attention du personnage principal comme la priorité de l’auteure, ce sont les sensations, le toucher, l’odorat, des descriptions sublimes. Et puis, dans cette atmosphère feutrée, sourde, en des lieux qui ne sont pas nommés, l'histoire subitement tourne presque au polar avec ce mort mystérieux, Leandro Martin et la soif de comprendre qui va animer notre héros. Et puis, il y a bien plus que cela. Il y a ces relations furtives que notre homme entretient, cette passion pour la forêt, cette nécessité d'absolue liberté, son chez-lui rassurant, les heures du dimanche qui s'écoulent, les minutes du boulot qui s'enchaînent. Et puis il y a Eva. Et tout est différent malgré lui.Il aime la forêt sauvagement, sensuellement. Alors que s’écoulent longuement les heures de labeur sur la chaîne, il pense à la prochaine chasse, à ses prochaines sensations. Homme solitaire, il ne lui reste que son grand-père, Lou, qui lui a tout enseigné de la chasse. Aux femmes, il ne veut pas avoir à s’attacher. Lors d’un samedi de chasse, il découvre en pleine forêt un homme mort. Cette vision va l’obséder, d’autant plus qu’il a retrouvé près du corps un carnet intime noirci de paroles bibliques par cet homme énigmatique qui s’est lentement laissé mourir...
C'est irrésumable mais c'est d'une absolue beauté. Tout le roman. Et cela nous entraîne dans un rythme agréable, et toujours surprenant, jusqu'à la dernière ligne que l'on attendait même pas. Sans rien connaître de son nom, de son histoire, de ses parents, on devient incroyablement attaché à ce personnage principal, à ses errements, à ses fuites, et peu à peu, à sa nouvelle naissance.Extrait:
"La forêt est grande, profonde, vibrante, vivante et vivifiante. Elle est quelque chose comme une femme qui voudrait l'homme sans lui dire. Quelque chose qui dit oui sous la robe mais qui s'est perdu dans la bouche, qui devient tendre dans l'humus et vous jette des ronces au visage. La forêt est comme ça, ici. Le sauvage sait y faire. L'attirance qu'elle éprouve à se faire explorer, elle la garde au-dedans, de la sève en puissance qui coule sous la terre, qui monte comme une odeur et vous emballe sur-le-champ. Même le ciel, au-dessus, ne reste pas indifférent."
Pour Douna Loup c'est un premier roman. Pour moi c'est aussi mon premier roman poétique, voire pictural. Il a fait ma rentrée littéraire. _____ [merci Babelio]