A propos de Vous allez rencontrer un bel et sombre inconnu de Woody Allen 2 out of 5 stars
A Londres, Sally, l’épouse d’un ex-écrivain à succès (Roy) tombe amoureuse du galeriste pour qui elle travaille. Sa mère Héléna est une hypocondriaque devenue alcoolique et qui croit en la réincarnation depuis qu’Alfie, son mari, l’a subitement quittée après 40 ans de mariage ! Quant à Roy, il est fasciné par sa voisine d’en face, Dia, une ravissante jeune femme sur le point de se marier…
Entremêlant histoires d’amour et couples de différentes générations, Vous allez rencontrer un bel et sombre inconnu est une déambulation élégante et poétique en Angleterre, un croisement aléatoire et pour le moins chaotique de destins amoureux. Où le style de Woody Allen, sur fond de musique jazz, est immédiatement reconnaissable. Entre ironie et auto dérision.
Mais il y a un élément nouveau qui semble obscurcir le ciel pourtant chargé déjà des angoisses du réalisateur américain né en 1935. C’est le constat de la vieillesse, inexorable, qui le guette. Au début du film, par la voix d’Alfie (Anthony Hopkins), Allen glisse qu’elle a pourtant toujours glissé sur lui, mais voilà qu’elle semble soudain l’avoir rattrapée. Comme si il ne pouvait plus l’ignorer ni y échapper…
Il a beau faire le malin, Woody, briller comme à son habitude dans l’auto dérision et le nihilisme de son double Alfie, entiché d’une jeunette vulgaire pour qui il se ruinera avant d’être cocu, ses pirouettes sont une posture qui cachent mal son inquiétude et sa peur de vieillir.
Comme si il n’arrivait plus cette fois à fuir dans la dérision, comme si sa citation du MacBeth de Shakespeare, au début du film : « C’est une histoire racontée par un idiot, pleine de bruit et de fureur, et qui ne signifie… rien » sonnait un peu creux, ne parvenant plus à confondre ni à bluffer le spectateur. A détourner son attention. Il y a de vraies questions et une gravité qui assaillent Allen et qu’il déguise, élégamment, derrière un pseudo cynisme et une dérision de tout. Une ironie qu’il prolonge souvent dans ses interviews.
Que retenir sinon de Vous allez rencontrer un bel et sombre inconnu ? C’est un film moyen, dans la lignée de Whateverworks. Le personnage d’Helena est le plus drôle et le plus profond, interprété par une très bonne Gemma Jones, mais il est redondant aussi, à l’image du 46ème film de Woody Allen.
Pourtant, Vous allez rencontrer un bel et sombre inconnu était parti sur des bonnes bases et un rythme soutenu. Dans la première demi-heure, les vannes d’Helena à l’encontre de son gendre Roy, écrivain raté voire futur imposteur, font mouche. Le rythme enlevé se combine au plaisir de retrouver l’humour absurde et déjanté du réalisateur d’Annie Hall. Mais peu, ce même rythme faiblit, les répliques autrefois mordantes de la tourmentée et comique Helena deviennent répétitives et font un peu tourner le film en rond. Des longueurs apparaissent, une monotonie pourtant ennemie de la comédie. On ne la fait pas au réalisateur de Woody et les Robots pensait-on, mais le scénario de Vous allez rencontrer un bel et sombre inconnu s’étiole et tombe pourtant peu à peu comme un soufflé.
C’est-à-dire qu’hormis le constat de la vieillesse, rien de nouveau sous le soleil du trublion Woody Allen. On s’ennuie un peu, déçu que les personnages incarnés par Banderas (le galeriste) ou Sally (Naomi Watts) soient un peu conventionnels et n’aient pas plus d’épaisseur. Même Anthony Hopkins semble un peu en dedans, coincé par le côté trop « woodyallien » de son personnage de vieux batifoleur manquant cruellement de lucidité.
Josh Brolin (Roy) est plus drôle et plus à l’aise dans son rôle d’écrivain plagiaire. Plus dégagé des contraintes et du carcan de son personnage. Mais c’est d’une tension dramatique qu’il manque dans Vous allez rencontrer un bel et sombre inconnu. Sans que le film ne soit désagréable à regarder, il est loin du niveau d’un Zelig.