Véritable déception au Châtelet où se donne jusqu'à la fin de la semaine ce classique du théâtre musical écrit en 1927 par Oscar Hammerstein II, d'après le roman d'Edna Ferber, sur des musiques de Jerome Kern.
Si la production s'avère honnête et de qualité, l'oeuvre, sans doute osée et novatrice dans les années 20, abordant pour la première fois des tabous tels que les problèmes raciaux ou conjugaux, a péniblement passé les années et paraît aujourd'hui ne pas aller très loin dans le propos... Sans parler d'une musique dotée d'une personnalité bien faiblarde. Car pour quelques timides tentatives de ragtime, spirituals, jazz ou charleston, on a surtout droit, plus de deux heures durant, à de dégoulinants airs d'opérette affreusement "guimauve".
Dans "Show Boat", nous suivons la vie d'une famille d'artistes sur un bateau-théâtre parcourant le Mississipi où se succèdent des tableaux proprement et sagement réglés, malheureusement souvent sans grande utilité à l'histoire, et passée la première partie, l'ennui fait vite son apparition.
Blancs et noirs se côtoient (pour la première fois sur scène à l'époque) sans que jamais, ou si peu, leurs rapports ne soient développés, les noirs faisant presque office de figurants, si l'on excepte le très joli passage de la célèbre chanson "Old Man River" admirablement interprétée par Otto Maidi.
Que dire aussi de la description des rapports conjugaux ? La jeune première, lamentablement abandonnée par son mari ruiné, avec pour unique explication une simple lettre, devant se débrouiller seule pour élever son enfant, est ravie de le retrouver 20 ans après sans qu'aucun nuage n'ait terni leur union... Je ne sais pas ce que vous auriez fait à sa place, mais je lui aurais, pour ma part, réservé un accueil des plus frais...
Enfin rions un peu. C'est un détail, mais un détail qui a son importance. Depuis que Montserrat Caballé s'était retirée des feux de la rampe, il me semblait que nous en avions fini avec les jeunes premières de 20 ans, soit disant irrésistibles, interprétées par des quadras dont la surcharge pondérale ne peut être ignorée, même habilement corsetée dans une toile de parachute. Ce n'est visiblement pas le cas...
En résumé, une oeuvre à propos de laquelle on se demande s'il est encore bien utile de la monter, tant son côté avant-gardiste semble avoir mal vieilli et dont on ne retient qu'une succession de tableaux gentillets.
Malheureusement dispensable.
Quelques extraits sur la page d'accueil du théâtre. Cliquez sur le lien suivant :
http://www.chatelet-theatre.com/chatelet1011/showboat,450