Ou est passé le Houellebeck que j’aimais ?
J’ai lu la carte et le territoire, mais je ne l’ai pas dévoré. Certes, le style reste fluide , mais son épuration poussé a l’extrême joint à un ton volontairement détaché, “non impliqué” finit par provoquer, chez moi, lecteur, une certaine distance. Le style est tellement neutre plat que les divers emprunts ( wikipedia, notices ministérielle, brochures publicitaires) s’y intègrent parfaitement sans que l’on ne discerne les coutures. Avec ses premiers romans, j’étais dans la salle d’opération, là j’assiste à la dissection de l’extérieur, je regarde par une baie vitrée et, hors de l’action, parfois je me lasse,
Le constat sur l’incommunicabilité du monde et l’obligation de la solitude ne rompt en rien avec ses précédents constats, mieux même il en est la conséquence logique et, tout compte fait, corresponds toujours aussi intimement avec ma vision du monde. Mais même la possibilité d’une ile a disparu. Le Houellebeck de 30 ans avait bien observé le monde qui l’entourait, le raillait avec délectation et noyait sa tristesse sous un rire cynique. Jeune trentenaire en rupture de banc, je partageais le constat, la révolte et l’espoir de “l’extension du domaine” et “des particules”. “Plateforme”, comme” la possibilité d’une ile” me sont apparues comme des ultimes tentatives, désespérées, de rencontrer l’intimité au sein d’un monde devenu fou, et la encore, les romans résonnaient avec mes propres constatations sur le monde , sur mes propres interrogations. Avec la cinquantaine, le constat devient réellement déprimant. Certes l’amour peut encore donner de beaux moments, mais comment aimer quand on ne croit plus en rien. Même l’art n’existe plus. Ne reste que l’alcool ou l’activité professionnelle, mécanique. Et c’est de là, je crois que me vient la déception : Ou est passé le Xavier que j’aimais…