"Les éclaireurs" fait suite à l'excellent premier opus d'Antoine Bello, "Les Falsificateurs". Ce premier tome relatait l'enrôlement de Sliv Darthunghuver, brillant étudiant islandais, dans une organisation secrète, le CFR. Ce CFR, Consortium de Falsification du Réel, produit des scénarios qu'il s'efforce ensuite de rendre crédibles, avec moult fausses sources et modification de documents existants.
Ce premier roman d'Antoine Bello proposait une trâme originale et haletante, qui vous laissait impatient de lire la suite, les tant attendus "Eclaireurs". Car entre la première et la dernière page des "Falsificateurs", notre jeune héros devenait une des recrues les plus prometteuses de l'organisation, mettant au service de nobles causes ses talents de scénariste et de falsificateur, décrochant au passage le prix du meilleur premier scénario et intégrant la prestigieuse Académie du CFR.
Dans ce second opus, on peine à se remémorer le jargon du premier, perdu au milieu de toutes les appellations propres au CFR et au métier de falsificateur. Sans doute vaudrait-il mieux lire les deux tomes à la suite, ce que permet aujourd'hui la parution des deux en version poche. Bref, au-delà de ces petits désagréments liés à la chronologie de lecture de chacun, on s'avoue malheureusement vite déçu par cette suite, bien en deçà des qualités du premier tome et des nos attentes.
L'histoire, qui flirtait déjà avec la ligne jaune de l'invraisemblance dans "Les Falsificateurs", tombe carrément du côté obscur de la crédibilité, présentant l'indépendance du Timor Oriental et même l'invasion de l'Irak par les Etats-Unis comme le fruit des manoeuvres du machiavélique CFR. Les bonnes idées ne manquent pas mais le bât blesse surtout côté style ; Antoine Bello connaît bien son sujet, les méandres de l'administration Bush en particulier, mais peut-être même trop bien, au point qu'on a parfois l'impression de lire un réquisitoire en ordre contre George W., son équipe et même un peu l'Américain moyen en général. Cette pincée d'anti-américanisme primaire hérisse un peu le poil du lecteur, qui trouve que l'amalgame Bush = America est un peu fort de café en 2010.
Malgré tout, l'intrigue reste plaisante et divertissante ; l'ouvrage plaira sûrement aux lecteurs avides d'histoires qui sortent de l'ordinaire.
Les éclaireurs, d'Antoine Bello. Disponible en poche
Prix France Culture - Télérama 2009