Je suis attirée.
Je déboule l’escalier en bois, j’entends des gémissements. Le parquet craque sous mes pas, ça sent bon la cire. Une femme est allongée sur le lit blanc, elle est en train d’accoucher. Je continue à dévaler l’escalier. Il est en colimaçon : la descente est vertigineuse. Ca tourne, ça tourne, ça tourne ! Et je tiens le cordon qui m’empêchera de tomber. Je suis entraînée dans un tourbillon, je suis trempée, je suis en nage, je suis dans le ventre de ma maman.
Je ne fais qu’un avec elle. Elle sourie malgré sa souffrance. J’entends des voix non loin de là : certainement qu’on m’attend. Je ne perçois pas d’intonation masculine, je ressens comme une grande solitude.
Je poursuis ma route vers la lumière et tiens donc ! Un autre rai m’interpelle derrière les volets clos, une complainte m’attriste, quelqu’un se lamente.
Il fait sombre cette fois ci, la pièce est froide et stricte. Une femme peste et rage d’avoir à sortir cet enfant. Pauvre innocent qui déjà supporte tous les enfers de la terre ! … Mais … Je connais ce ton, ce visage. Oh mon Dieu ! Mais c’est ma grand-mère et la petite qui pointe le bout de son nez, c’est toi Maman ! Pourquoi donc Mamette est-elle tellement en colère d’enfanter ?
Brrr, je sors vite de cette pénombre. Je préfère retourner me blottir contre le sein de ma maman. Je ne sais pas si je vais regrimper l’escalier, je suis si bien loin du monde extérieur, loin de la civilisation. Je ne veux pas qu’on me coupe le cordon, je veux me faire cajoler.
Non ! Décidément, je ne referais pas le chemin à l’envers. Je reste là.