Oubliez l'incessante pluie. Pendant un bon deux heures, après une agréable première partie assurée par Leif Vollebekk (n'en déplaise aux nombreux irrespectueux jaseux, en grande quantité), l'excellent groupe Karkwa a su se livrer à son meilleur pour en mettre plein la vue, mais surtout plein les oreilles pour la horde de fans sans contredit comblés.
Ça n'a pas pris de temps. Alors que tous s'attendaient à la désormais incontournable Le Pyromane comme pièce d'ouverture de cette rentrée (ce à quoi nous avons tout de même eu droit), c'est plutôt à l'extraordinaire, mais tout à fait inattendue, conclusion ascendante de la sublime Dors dans mon sang qui a lancée le coup d'envoi. Dès lors, on savait que les prochains instants à passer avec le groupe frôleraient de très loin la redite.
En effet, mise en scène simple, mais efficace, bénéficiant d'éclairages admirables en harmonie totale avec les mélodies, tout en prenant bien soin de combler tous les espaces vides, disons que le groupe s'est donné corps et âme pour offrir leur musique dans toute son intensité.
Ainsi, balançant bien les pièces de leurs plus beaux albums, soutenu en ensemble par le niveau d'excellence que leur sonorité a atteinte avec le temps, ne manquant pas quelques détours revisités de leurs débuts, le groupe a su livrer toute la douleur, la mélancolie, mais également, la légèreté, non-délaissée, d'un bon nombre de leurs pièces.
La sono dans le tapis, les vibrations plein le corps, si dans des moments d'une lourdeur infinie façon Le bon sens on avait l'impression de s'enfoncer dans le sol, c'était plutôt une impression de légèreté qui agissait lors d'envolés à la Moi-léger ou même L'acouphène, s'emparant entièrement de nous.
Bien sûr, tout en multipliant les frissons lors de leurs performances (irrésistible Le Solstice, entre autre), les membres (surtout Louis-Jean Cormier, comme à l'habitude) n'ont pas manqué quelques interactions fortement bienvenues, donnant au grand Métropolis des airs d'intimité. Spécialement lors d'erreurs aussi mignonnes que pardonnables comme des oublis de paroles sur une de leur pièce la plus connue, ou des références à tout et rien ici et là. Encore plus lorsque leurs interprétations se voyaient magnifiées par les voix mariées à l'unisson de tous ces fans chantonnant les poétiques paroles du groupe avec satisfaction.
Avec plus d'une vingtaine de chansons en liste, disons que le groupe a su doser sa soirée avec magnificence en ne manquant pas de nous laisser respirer ici et là, le temps de reprendre notre souffle et nos émotions, encore chamboulés par tant de beauté. À cela, on peut sans contredit penser à ce plus que sympathique premier rappel liant les membres de Karkwa à ceux de Leif Vollebekk pour un jam blues, lié entièrement à leur envie la plus impulsive.
On remerciera la liberté prédominante ne manquant pas d'allonger ou de revigorer dans la perfection leurs pièces, pour leur redonner encore plus de valeurs sur scène que sur enregistrement. Ainsi, si Dormir le jour se voyait étirer dans le temps pour mieux savourer ce sentiment de transe incroyable, au même titre que 28 jours, il faut également célébrer une Deux lampadaires inversée en sens (les refrains habituellement explosifs adoucis pour laisser les couplets s'emparer de la dose d'énergie) ou encore une Oublie pas, habituellement ballade, transformé ici en pièce féroce, mais tout autant crève-coeur.
Ultimement, jouïssant plus que merveilleusement de leur talent qui n'est plus à prouver, profitant dans un bonheur envieux de leur aisance sur scène, c'était ici la soirée idéale, remplie par des pièces qu'on ne souhaitait même plus, mais qu'on se voyait bel et bien offrir en cadeau (les nombreuses Le compteur, Mieux respirer, La piqûre et j'en passe), profitant de longs rappels jusqu'à la définitive Le vrai bonheur, martelant au sol le public déchaîné, encore tout secoué par le beauté de l'ensemble.
Enfin, tout autant rock que pure symphonie, Karkwa c'est la maturité en musique, la beauté suprême, celle qui n'a pas peur d'admirer les laideurs par leurs qualités libératrices, laissant ressortir et ressentir les douleurs les plus profondes des tripes jusqu'au fin fond de l'au-delà, au point de nous laisser nous envoler dans la plus belle des harmonies. Justement, c'est ce paradis-là même qui a été atteint jeudi soir dernier. Chapeau, la tournée est lancée et leur plus récent disque, au même titre que leur précédent, encensé à l'unanimité. Peut-on parler de plus grande réussite?
À noter que le groupe sera en supplémentaire le 11 décembre prochain, également au Métropolis.
Publié le 04 octobre 2010 par Jimmy Chartrand, Côté Blogue