j’ai écouté la radio toute la nuit du 17.
et les voisins ont applaudi
et la proprio a frappé à ma porte
et a dit
S’IL VOUS PLAIT
S’IL VOUS PLAIT
S’IL VOUS PLAIT
DEGUERPISSEZ,
vous salissez les draps
d’où vient le sang ?
vous ne travaillez jamais.
vous vous prélassez vous parlez à la radio
et vous buvez
et vous avez une barbe
et vous souriez tout le temps d’un air narquois
et vous amenez ces femmes
dans votre chambre
et vous ne vous peignez jamais
et ne cirez pas vos chaussures
et vos chemises sont toutes froissées
pourquoi ne vous en allez-vous pas ?
vous rendez les voisins
malheureux,
s’il vous plaît rendez-nous heureux
déguerpissez !
va au diable, bébé, ai-je sifflé à travers
le trou de la serrure ; mon loyer est payé jusqu’à
mercredi. puis-je vous montrer une aquarelle de
nu peinte en 1887 par un artiste allemand
inconnu ? je l’ai fait assurer pour
1000 $.
sans se laisser fléchir, elle a continué à taper du pied dans le couloir.
pas une artiste, elle. j’aimerais
bien la voir dans le nu, pourtant.
peut-être pourrais-je peindre mon chemin
vers la liberté. non ?
Charles Bukowski, Les jours s’en vont comme des chevaux sauvages dans les collines (The Days Run Away Like Wild Horses Over the Hills, 1969) ©Editions du Rocher pour la traduction française, 2008.