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Militante jusqu’au bout des doigts, d’un esprit vivace et d’un courage indestructible, Nouara Naït Mebarek, appelée communément Na Nouara, 70 ans, participe, comme à l’accoutumée, au rassemblement tenu pour soutenir les deux non-jeûneurs.
Vêtue d’une robe traditionnelle bleu ciel fleurie, d’une fouta kabyle et d’un foulard qui laisse glisser quelques mèches grises, Na Nouara se faufile dans la masse. Elle se permet même un bain de foule entre ses acolytes militants des droits de l’homme, le sourire aux lèvres malgré les rides sillonnant son visage. Native du village Tifilkout, dans la commune d’Illiltène, Na Nouara a grandi dans le fief de la protestation. D’un père et d’un frère moudjahids, la septuagénaire lance fièrement : «Je vis pour les droits de l’homme, contre l’injustice et le mépris. Je n’ai pas eu peur du colonialisme français que j’ai affronté sans arme, alors ce n’est pas le nouveau colonialisme algérien qui me ferait peur.» Na Nouara ne rate aucune date, marche ou rassemblement, pour manifester avec courage et exprimer ses idées et positions.
De Ifri, dans la wilaya de Béjaïa pour célébrer le 20 août 1956, à Alger pour assister à un sit-in de solidarité pour le journaliste Mohamed Benchicou, Na Nouara n’hésite pas à répondre présente lorsque le militantisme pour la liberté l’appelle. Mais une lueur sombre traverse ses yeux harassés de fatigue, lorsqu’elle évoque les 126 victimes du printemps noir de 2001 et le souvenir d’avril 1980. Mères de trois filles et d’un garçon, Na Nouara affirme inculquer ses propres idées à ses enfants qui ont déjà pris la relève. Même si elle puise son courage de sa famille, comme elle le décrit bien : «Le militantisme est dans le sang», son chien Bimbo prend la place de son bras droit.
Et elle ne manque pas d’ironie, lorsqu’elle raconte ce jour où... elle a lâché Bimbo sur le wali de Tizi Ouzou, lors d’une visite après les évènements de 2001. Même le président Abdelaziz Bouteflika n’a pas été ménagé par ce bout de femme qui a jeté des pierres sur son cortège à l’occasion d’une visite dans la région en 2004 !
El Watan