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Pourquoi la prison n’est pas un endroit pour mourir ?

Publié le 01 octobre 2010 par Rsada @SolidShell

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Ce n’est pas une affirmation. C’est une confession faite au magazine L’Express lors de l’interview d’Olivier Maurel, directeur de la prison de Poissy (78) et auteur du livre-confessions « Le taulier » sorti aux Editions Fayard.

A travers son livre autobiographique, Olivier Maurel retrace 20 ans d’une carrière passée à l’ombre des barreaux des prisons françaises. Le taulier, le Patron ou M. Maurel comme on l’appelle, y relate ses souvenirs, ses pensées et sa propre vision d’une prison à visage humain.

Une main de fer dans un gant de velours, telle peut-être aujourd’hui la dénomination exacte d’un bon directeur de prison. Ainsi, le directeur qu’il est concède que pour exercer –et assumer- pleinement son autorité il est nécessaire de « …passer en souplesse, et si ça ne marche pas, on passe en force ».

Olivier Maurel n’occulte pas non plus la réalité ou triste spécificité des prisons françaises. A la question de savoir ce qu’il aimerait y changer aujourd’hui, il évoque la question des conditions de détention dans les maisons d’arrêt en constatant, presqu’avec regrets, qu’un prévenu subi un traitement parfois plus strict qu’un détenu condamné.

Son propos est complété par le cas problématique des délinquants sexuels qui n’ont à ce jour pas d’obligation légale de suivi thérapeutique. Pour lui, un délinquant sexuel condamné à une peine de 15 ans de prison perd 15 ans de sa vie certes, mais 15 ans de soins aussi…

Passionné de musique, M. Maurel semble imposer parfois une contrainte supplémentaire aux détenus en allant se produire devant eux. Un bel appel du pied pour souhaiter une future démocratisation de la culture en prison tout en la valorisant. Une belle occasion aussi de souligner l’initiative estivale de Yannick Noah qui n’a pas hésité à se produire dans des établissements pénitenciers accueillants des détenus en longues peines pour la promotion de son dernier album Frontières sortie le 23 août dernier.

Enfin, puisqu’il faut toujours une fin, j’ai été particulièrement ému de lire la réponse d’Olivier Maurel à la question posée sur son plus mauvais souvenir. Sa réponse résume le sens de certains de mes pourquoi changer la prison en France : « Le souvenir le plus pénible, et qui m'a laissé le plus de traces psychologiques, est le suicide d'un détenu de 19 ans, incarcéré 3 mois pour le vol d'un scooter. Grâce aux connaissances médicales d'un autre détenu, nous avons réussi à faire redémarrer ses fonctions cardio-respiratoires... avant qu'il ne meure "une seconde fois". En tant que directeur, j'étais en charge de prévenir ses proches, mais ce jeune homme n'avait aucune famille. Après une enquête auprès de la police, je n'ai pu trouver qu'un cousin éloigné qui considérait que "c'était bien fait pour lui". La prison n'est pas un endroit pour mourir ». Tout est dit.

Une conclusion rappelant qu’à ce jour en 2010, 89 détenus se sont suicidés ou sont décédés de manière suspecte dans les prisons françaises.

A la manière d’André Malraux : « Quand les hommes sortent de prison, neuf fois sur dix leur regard ne se pose plus. Ils ne regardent plus comme des hommes ».


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