Contre toute attente, l'EFSA vient de conclure, suite à l'analyse d'études scientifiques faites sur le bisphénol A (BPA), qu'il n'y avait pas lieu d'interdire cette substance, ni de reconsidérer la dose journalière admissible (DJA) qui est actuellement de 0,05 mg/kg de poids corporel.
L'Agence considère en outre que " les données actuellement disponibles n'apportent pas d'éléments probants concernant une toxicité neuro-comportementale du BPA".
Certes l'Agence reconnait que " des études récentes font état d'effets indésirables chez des animaux exposés au BPA pendant leur développement à des doses bien inférieures à celles utilisées pour déterminer la DJA actuelle ". Mais elle considère que ces études présentent des lacunes et que leurs résultats ne peuvent être transposés à la santé humaine.
Les industriels vont donc pouvoir continuer à utiliser, la conscience tranquille, les BPA dans la fabrication des canettes de boissons, des boîtes de conserve, des plastiques alimentaires (barquettes, assiettes, verres, couverts....), des dispositifs médicaux, seringues, matériel de perfusion., implants....
Seuls, en France, les biberons au bisphénol A resteront interdits, malgré l'avis de l'Agence, comme vient de le préciser Chantal Jouanno, Secrétaire d'Etat à l'Ecologie.
Les dangers des perturbateurs endocriniens
De nombreux experts internationaux ont lancé depuis plusieurs années l'alerte sur les dangers du bisphénol A, classé dans la liste des perturbateurs endocriniens au même titre que les résidus d'hormones médicamenteuses, le chlordécone, les phtalates, la dioxine, les PCB... et de nombreuses substances contenues dans les pesticides( herbicides, fongicides, insecticides).
Lire : Santé : la menace des hormones médicamenteuses dans l'eau du robinet et l'alimentation
C'est au début des années 1970 que les scientifiques ont commencé à s'inquiéter de la forte augmentation des troubles endocriniens dans la première génération adulte qui avait été exposée aux substances chimiques de synthèse massivement utilisées après guerre. Mais il leur a fallu 20 ans pour avancer l'hypothèse que les substances contenues dans ces produits chimiques pouvaient perturber le système endocrinien, en mimant les effets des hormones naturelles de l'organisme, et être à l'origine de ces troubles et des maladies qui en découlent. Et rapidement, étude après étude, leur hypothèse a été confortée et confirmée par les observations cliniques sur le terrain.
En 1999, la Commission Européenne a commencé à prendre en compte le problème et a présenté une stratégie visant à encourager la recherche et identifier les actions politiques appropriées à mener. Une nouvelle loi, la loi REACH, a été adoptée pour obliger les industries chimiques à fournir des données de sécurité sanitaire et environnementale sur toutes les substances qu'elles produisent. Le but étant que les substances chimiques " extrêmement préoccupantes " soient abandonnées et remplacées.
La loi est entrée en vigueur en 2007, mais elle n'a pas encore été appliquée.
En 2005 des scientifiques réunis à Prague ont lancé une alerte.
La France a réagi en lançant un programme national de recherche sur les PE (PNRPE) sous l'autorité du Ministère de l'Ecologie.
Cette année, les Députés ont décidé d'interdire la commercialisation des biberons contenant du BPA à partir de janvier prochain. Et la Secrétaire d'Etat à l'Ecologie vient de confirmer le maintien de cette interdiction.
Aux Etats-Unis, un projet de loi intitulé " Loi sur la Prévention des perturbations endocriniennes ", a été déposé au Sénat en décembre 2009 par Mr John Kerry.
Au Canada, au Danemark, et en Australie et dans plusieurs Etats Américains le bisphénol A est interdit.