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Rêve de paix en Palestine-Israël.

Publié le 06 octobre 2010 par Valabregue

Mesdames, Messieurs, gagner le Prix Méditerranée est particulièrement émouvant pour moi, car je me considère comme quelqu’un de méditerranéen, quelqu’un qui a passé sa vie au cœur de paysages peuplés d’oliviers et de ciels bleu clair, de puits et de vergers, de désert et de mer, de ruines antiques et de souvenirs vivants. Mes parents se voyaient comme des Européens et moi, je me pense Méditerranéen. La plupart des habitants d’Israël sont venus de pays méditerranéens ou sont nés au bord de la mer Méditerranée. Par leur tempérament, leur exubérance, leur propension aux disputes, leur enthousiasme, leur chaleur, les Israéliens appartiennent à un film de Fellini, pas à un film de Bergman. Israël  la juive est un camp de réfugiés ; la moitié de ces réfugiés ont fui ou ont été expulsés d’Europe et l’autre moitié a fui ou a été expulsée des pays arabes. La Palestine aussi, est un camp de réfugiés. Le conflit israélo-palestinien est en réalité une confrontation tragique entre deux camps de réfugiés. Le conflit israélo-palestinien est aussi un combat tragique entre deux victimes de l’Europe. – les Arabes qui ont subi l’impérialisme, le colonialisme, la répression et l’humiliation, les Juifs qui ont souffert la discrimination, la persécution et finalement un génocide sans comparaison dans l’Histoire. Devant cet état de fait, les deux victimes, en particulier quand elles sont victimes du même oppresseur, devraient fraterniser. Mais la vérité,  à la fois au niveau des individus et des pays, c’est que les  guerres les plus violentes éclatent souvent entre deux victimes d’un même oppresseur. Les deux fils d’un père abusif verront toujours dans l’autre frère le visage du père cruel. Et c’est le cas avec les Juifs et les Arabes. Chacun voit dans l’autre l’image de l’oppresseur d’hier. Les Arabes regardent Israël la juive et ne la voient pas telle qu’elle est, à savoir un camp de réfugiés à moitié hystérique. En lieu et place, ils voient en elle le bras armé, arrogant, oppressif et exploiteur du colonialisme européen. Nous regardons les Arabes et au lieu de voir en eux des compagnons de souffrance, nous y voyons les persécuteurs de notre passé – des cosaques antisémites, des nazis à moustache bronzés - , prêts à nous égorger.

J’ai dit plus haut que le conflit israélo palestinien est tragique. C’est en réalité une tragédie, mais pas une tragédie occidentale, même si ici en Europe vous aimez toujours voir les choses en noir et blanc. Le cœur du conflit est un télescopage entre deux façons d’avoir raison, et souvent entre deux façons d’avoir tort. Les Palestiniens sont en Palestine parce que la Palestine est le pays des Palestiniens exactement comme la Grèce est le pays des Grecs ou comme la Norvège est le pays des Norvégiens. Les juifs israéliens sont en Israël parce qu’ils n’ont pas de patrie et que jamais, en tant que nation, ils n’ont eu d’autre patrie que la terre d’Israël. Les Palestiniens n’ont pas d’autre endroit où aller et les israéliens non plus.  La totalité des terres objet du litige est plus petite que la Hollande, et pourtant, il n’y a pas d’autre option que de la diviser en deux pays, Israël et la Palestine. Les Israéliens et les Palestiniens ne peuvent pas devenir un même peuple vivant dans le même pays et il ne peut être question de les obliger à partager le même lit après un siècle de violence et de haine. Personne n’aurait pu rêver, juste après la deuxième guerre mondiale, de faire de la Pologne et de l’Allemagne un seul et même pays. Les Juifs israéliens et les Arabes palestiniens ne peuvent pas, à ce stade, se transformer en une famille heureuse, parce qu’ils ne sont les mêmes, ils ne sont pas heureux et ils ne sont pas une famille. Ce sont deux familles malheureuses ; et c’est pourquoi il est urgent de partager la maison en deux appartements plus petits comme l’ont fait  les Tchèques et les Slovaques, sans verser une goutte de sang.

Mesdames, Messieurs, le temps est venu de nourrir des espoirs nouveaux. La distance entre les positions israélienne et palestinienne dans les négociations pour la paix n’est certes pas négligeable, mais elle est certainement plus ténue qu’elle ne l’a jamais été en cent ans de conflit. Il est difficile de se faire prophète, en particulier à Jérusalem – la concurrence est féroce – mais permettez-moi de conclure par une petite prophétie : un jour viendra où il y aura une ambassade d’Israël en Palestine et une ambassade de Palestine en Israël. Et on pourra aller de l’une à l’autre ambassade à pied car l’une d’elles sera dans Jérusalem-ouest, capitale d’Israël et l’autre, dans Jérusalem-est capitale de la Palestine. Les extrémistes des deux bords continueront à faire tout leur possible pour ruiner un compromis de paix historique, mais la paix viendra parce que la majorité des deux peuples le veut et parce que, des deux côtés, les extrémistes sont minoritaires.

Mesdames, Messieurs, membres du jury du prix Méditerranée, merci d’avoir jugé mon livre, « Scènes de vie villageoise » digne d’être récompensé. Et en effet, c’est  un livre méditerranéen, écrit par un homme méditerranéen qui espère la paix et la compréhension entre toutes les nations de la Méditerranée.


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