Louyre, astronome en temps de paix, capitaine en temps de guerre, intrigué par cette mystérieuse jeune fille affamée retrouvée près d’un corps carbonisé, prête à tout pour retrouver ces lettres nécessaires à son existence, ces lettres écrites du front russe par son père , prête à se donner au Français,«à cet infâme porc au regard plus éteint qu’une fosse à purin.» Et ce grand bâtiment gris, cette maison de repos, cet hôpital, fermé par décret gouvernemental. Il y a là des secrets palpitants pour un homme ordinaire menacé d’ennui.
Artisan d’atmosphère, Dugain, dès les premières pages, accroche avec cette écriture acérée, sombre, lugubre. Il nous plonge rapidement dans ce climat de désolation d’après-guerre, ce calme étrange, ce froid brouillard, qui camoufle du regard où le vainqueur prend plaisir à avilir ce conquérant déchu. « Une sombre affliction enveloppait les passants de sa brume humide. Leur désarroi était semblable à celui d’un violeur juste après qu’il est accompli son acte, quand vidé de son désir criminel, celui-ci perd son sens. Ce peuple avait défié les lois de l’apesanteur humaine dans un allègement fanatique ». Finaliste de plusieurs prix littéraires pour 2010, un gagnant peut-être, mais qui vaut sûrement le détour.