François Fillon est peut-être l'antidote le plus redoutable face à la percée de Dominique de Villepin. Il incarne un volet social qu'il manifeste de façon de plus plus revendiquée dans la filiation de son seul mentor : Philippe Seguin.
La notion de "modèle français" redevient d'actualité.
L'enjeu est simple. Il faut réveiller les Français. Ils doutent quant à leur identité. Leur volonté de "vivre ensemble" s'estompe en raison d'une poussée de cultures différentes clivantes.
Une apathie générale s'installe. Ce climat est peu propice aux efforts collectifs pourtant nécessaires dans de multiples domaines.
Toutes ces circonstances vont dans le même sens : le besoin de redéfinir le ciment de nos groupes sociaux.
Tous ces facteurs peuvent, dés à présent, laisser prévoir que la définition "d'un modèle français" sera au centre des débats de la prochaine élection présidentielle.
Il ne peut seulement être question de rupture ou "d'exception française". La notion de rupture constitue une étape déjà "digérée" par l'opinion publique et décrédibilisée depuis 2007.
Peut-il être alors simplement question de préserver une ou des "exception(s) française(s)" ?
La notion même "d'exception française" est par définition très restrictive et défensive. Il s'agit de protéger des droits acquis. Il n'est pas question de les exporter voire même d'en conquérir de nouveaux. Ces deux notions ne peuvent constituer "des drapeaux" mobilisateurs à la hauteur des défis du moment.
Cet enjeu conceptuel trouve son creuset dans la certitude de singularité et d'exemplarité qui berce les Français depuis de nombreuses décennies au moins.
Avec de tels repères culturels, il est difficile de ne pas concevoir un modèle ambitieux. L'enjeu est de construire un patriotisme moderne, une sorte de nationalisme contemporain.
En août 1914, Poincaré écrivait : "La France sera héroïquement défendue par tous ses fils dont rien ne brisera devant l'ennemi l'union sacrée".
Il faut identifier, conceptualiser, concrétiser la "guerre pacifique" qui peut justifier une telle union sacrée. Cet enjeu est d'autant plus important qu'il cache un nouveau positionnement du "pouvoir". Le pouvoir est aujourd'hui perçu comme un briseur d'énergie, un frein, un casseur de vitalité.
S'il parvient à s'associer au "réveil" à partir d'un projet mobilisateur, c'est l'ensemble de l'image de marque du pouvoir qui en sera transformée à tous les échelons.
Le maintien de François Fillon à Matignon comme son éventuel transfert à une autre fonction éminente cache cet enjeu conceptuel qui s'installe au coeur du débat 2012.