Festival de Dubaï 2009 : Prix du Meilleur Film
Des « Lola », le cinéma en connaît des célèbres, de la Montès de Max Ophuls (dans ce blog), à celle de Jacques Demy, ou de la femme allemande de Fassbinder. Mais cette « Lola », dans la langue des Philippines., c’est une grand-mère, référence aux deux héroïnes octogénaires du film de Brillante Mendoza, confrontées au même drame : le petit-fils de Lola Sepa a été tué d’un coup de couteau par un voleur ; sa grand-mère Lola Puring, en attente du procès, fait tout ce qu’elle peut pour le sortir de ce mauvais pas. Pour les funérailles de l’un ou la liberté de l’autre, l’argent peut tout régler. Elles le quêtent alors inlassablement ,dans les rues de la ville, sous une pluie battante…
Si cette histoire peut-être retranscrite sous toutes les latitudes,son enracinement dans la ville de Manille prend une toute autre résonance et à nos yeux d’occidentaux, peut paraître bien étrange. Il faut en effet savoir que les grands-parents jouent un rôle majeur au sein de cette société, où ils sont très respectés.
Encore plus au sein des familles , comme on le voit pour ces deux vieilles femmes , remarquables dans leur composition (Anita Linda et , Rustica Carpio), qui mènent de main de maîtresse enfants et petits-enfants dans des conditions très précaires. Un environnement social et culturel qui subrepticement s’impose dans le récit, comme une composante à part entière, et suscite autant de réactions et d’émotion que le fait divers en lui-même. A travers la quête des deux grands-mères, le cinéaste-documentariste nous dévoile une vie interlope dans une banlieue, Malabon, très éloignée du centre ville. Il faut composer avec ce quartier inondé toute l’année ,où les gens ont décidé de rester faute de mieux. Brillante Mendoza nous le rend ici tel qu’il est, avec ces fils électriques rasant les canaux improvisés, les déplacements en barque, l’église inaccessible…C’est Venise sans l’Italie. Quand il ne pleut pas, le ciel est toujours sombre et couvert.Mendoza mêle ainsi avec intelligence et sans falbala, une fiction très réelle (l’histoire est inspirée d’un fait divers), à la vérité du documentaire. Elle nous mène à l’intérieur d’une vraie prison avec de vrais gardiens et de vrais prisonniers entassés les uns sur les autres. Des scènes inimaginables en Europe, témoins d’un cinéma différent, mais bien réel quant à son contenu. Ici le fond et la forme s’accordent .
LES SUPPLEMENTS
Ils ne sont pas forcément à la hauteur du film, mais demeurent indispensables.
Mostra de Venise
La conférence de presse est plutôt convenue, le modérateur-animateur s’adjugeant une bonne partie des questions, au détriment des journalistes. On y apprend cependant que le réalisateur « a bien voulu montrer le côté obscur de la société philippine et la corruption des forces de l’ordre ».Une critique sociale qui s’inspire de ses propres observations « le fossé entre riches et pauvres est très large et je veux que le monde entier le sache ».
Il insiste aussi sur l’importance de la famille pour la culture philippine en réponse à … un journaliste ! « Les enfants restent au foyer tant qu’ils n’ont pas d’enfants, on vit chez nous au sein d’une grande famille. Les parents riches agrandissent leur maison et se compose ainsi une petite communauté, à part. C’est plus qu’une spécificité de notre culture, c’est vraiment nous ».
Pour l’anecdote, la scène de la chambre funéraire. Lola y pénètre avec appréhension pour les besoins du film, mais aussi parce que Anita Linda n’a pas envie d’y entrer. Et sa réaction est d’autant plus forte qu’à l’origine le défunt est joué par un acteur , qui a été préparé pour la scène .Entre temps le producteur a remarqué dans cette même chambre funéraire, un homme assassiné la veille . Sa famille ayant accepté, c’est lui qui est filmé. Mais Anita Linda n’est pas mise au courant. D’où sa stupeur.
C'est dans la prison de Manille que les scènes ont été tournées
Le panorama du cinéma philippin
C’est un panorama très didactique, sans apport vidéo.
Les biographies de
Brillande Mendoza, Anita Linda et Rustica Carpio.
Le DVD comprend : le film chapitré, la bande-annonce (2mn.), LOLA à la Mostra de Venise (17 mn.), le panorama du cinéma philippin (5 mn.), les biographies de Brillante Mendoza, Anita Linda et Rustica Carpio, la version française et la version originale sous-titrée.
19,99 euros le DVD