Résumé: Lorsque les deux meilleurs flics du département de la police criminelle de New York meurent dans un accident stupide, la brigade est en effervescence. Tous les flics ayant côtoyé les deux héros veulent en effet prendre leur place et accéder aux lauriers de la gloire. Et Terry Hoitz (Mark Wahlberg), frustré par son travail de bureau, est bien décidé à pousser son coéquipier Allen Gamble (Will Ferrell) à entrer dans la course, quitte à le bousculer un peu et à se mettre à dos tout le département…
Cette année, le buddy movie fait son grand retour sur les écrans américains. Après Kevin Smith et son lamentable Top Cops, c’est au tour d’Adam McKay (Talladega Nights, Step Brothers), toujours accompagné de son compère Will Ferrell, de parodier le genre. Une entreprise risquée, le genre étant un peu tombé en désuétude, et le trio Edgar Wright / Simon Pegg / Nick Frost ayant réalisé quelques années auparavant ce que beaucoup considèrent comme la comédie / hommage ultime sur le sujet avec Hot Fuzz. Mais Adam McKay n’est pas Edgar Wright, et son film prend bien heureusement une toute autre direction, beaucoup plus parodique, mais sans pour autant tomber dans le cynisme bas de plafond.
La scène d’ouverture donne immédiatement le ton du film : à la fois énorme scène d’action classique de blockbuster américain (une poursuite en voiture dans les rues de New York, avec explosions à la clé, méchants surarmés, flics intrépides et gouailleurs, et destruction de nombreux édifices) reprenant tous les clichés du genre et forçant le trait (la voiture des flics s’encastre dans un bus, bus qui sera ensuite utilisé pour défoncer le van des méchants, avec la voiture de police toujours coincée dedans !) et réflexion rigolarde sur les limites de ce genre de cinéma (les truands coincés par les deux flics avaient commis comme crime d’avoir quelques grammes de beuh sur eux !). Cerise sur le gâteau, les deux super flics en question sont incarnés par deux symboles de ce genre de films, Samuel Jackson et Dwayne « The Rock » Johnson, qui finiront quelques minutes plus tard écrasés sur le bitume après avoir tenté une action héroïque de trop (sauter du haut d’un building d’une vingtaine d’étages pour choper des bad guys). Une façon hilarante et brutale de faire rentrer le film dans le monde réel.
Car finalement, The other Guys ne parle que de ça : la confrontation des figures mythiques des super flics de ciné à la réalité du monde, un peu à la manière du génial Last Action Hero de McTiernan, mais en beaucoup plus terre à terre. Dans The other Guys, les héros soufflés par une explosion ne se relèvent pas indemnes, leur capitaine ne les soutient pas contre vent et marée, et les bad guys ne paient pas forcement pour leurs crimes… Pas étonnant dès lors que McKay et son équipe aient choisi de s’attaquer au sujet actuel et brûlant des spéculations boursières incontrôlables des traders de Wallstreet. Du coup les antihéros incarnés par Mark Wahlberg et Will Ferrell se retrouvent embarqués dans une enquête a priori anti spectaculaire sur les tractations boursières illicites d’un magnat de la bourse cherchant à dissimuler des opérations malheureuses. La crise économique actuelle imprègne toute l’intrigue, que ce soit dans le personnage du capitaine (génial Michael Keaton) obligé d’avoir un second emploi pour subvenir aux besoins de sa famille, ou encore dans le glaçant générique de fin présentant des statistiques bien réelles et effrayantes sur la folie galopante qui s’est emparée de l’économie en quelques décennies.
Mais bien évidemment, The other Guys est avant tout une comédie hilarante dans la droite ligne des œuvres précédentes du duo McKay/Ferrell. On retrouve donc l’humour déjanté à la limite du non sens de Talladega Nights (le flingue en bois de Ferrell, le club de clochards adeptes des orgies dans les voitures), ainsi que le sens aigu de la parodie du duo (voir le génial flashback sur le sombre passé de maquereau de Gamble, ou l’hilarante scène de repas au cours de laquelle Hoitz n’arrive pas à comprendre que Gamble puisse être marié à Eva Mendes). Le film est aussi bien évidemment rempli de futures répliques cultes, comme le fameux « Aim for the bushes » prononcé par Samuel Jackson avant qu’il ne s’écrase lamentablement sur le trottoir, ou les répliques du capitaine interprété par Michael Keaton, qui cite sans s’en apercevoir des paroles de chansons du groupe TLC. Plus surprenant en revanche est la performance des deux acteurs principaux. Mark Wahlberg étonne par son aisance dans la comédie pure, reprenant les mimiques de certains de ses rôles dans des actioners bas de plafond (Max Payne) et arrivant à faire rire en forçant à peine le trait, voire se mettant en danger (la scène du ballet). Quant à Will Ferrell, c’est sa retenue qui surprend, dans le rôle de ce petit bureaucrate qui ne veut rien d’autre qu’être tranquille et rester assis derrière son PC. On a plus l’habitude de le voir dans des rôles exubérants, en débile léger en train de hurler, mais il prouve ici qu’il est tout à fait capable de jouer sur un autre registre.
The other Guys est une fois encore une nouvelle preuve de l’éclatante vitalité et de la diversité du cinéma comique américain, qui n’hésite pas, sous couvert de grosse farce parodique, à s’attaquer à des sujets importants. Et tout ça sans oublier de faire rire aux éclats le public.
Note : 8/10
USA, 2010
Réalisation : Adam McKay
Scénario : Adam McKay, Chris Henchy
Avec: Will Ferrell, Mark Wahlberg, Michael Keaton, Eva Mendes, Dwayne Johnson, Samuel L. Jackson, Ray Stevenson