Vincent Thibault
Hamac
140 pages
Résumé:
Un vieillard trouve l'amour dans une vitrine. Une dent de requin préserve un souvenir d'enfance. Un homme est obsédé par un mystérieux grain noir... Des dix histoires qui composent La Pureté jaillit une poésie du quotidien, faite d'étrangeté, de transparences et d'éblouissements soudains. De l'indicible surgit une force, une confiance tranquille.
Mon commentaire:
La pureté est un recueil de nouvelles qui nous laisse une impression de grande beauté, d'étrangeté, mais aussi d'histoires racontées comme des tranches de vie, qui ont rarement une fin concrète. C'est un recueil dont j'ai apprécié la subjectivité, la transparence dans l'écriture et les sujets abordés. La plume de Vincent Thibault est forte, ses personnages sont esquissés, mais complets. Quelques mots, quelques phrases et tout est là, tout est dit. C'est un recueil qui donne le sentiment d'une lecture épurée, une impression de dépouillement et en même temps, de grandeur. Je trouve difficile de parler de ce court recueil car pour moi il évoque avant tout une émotion particulière, indéfinissable, lorsque je le lisais.
J'aime beaucoup les nouvelles. Alors que certains auteurs se contentent de courtes histoires, Vincent Thibault y met de la lumière. Ses textes ne sont pas que de simples textes, ils sont beaucoup plus profonds.
Ses nouvelles n'ont, pour moi, pas de fin clairement définie. L'histoire s'arrête un moment et offre une piste de réflexion autour de ses personnages. La quatrième de couverture parle de points communs entre l'écriture de Vincent Thibault et celle de Haruki Murakami et de Yoko Ogawa. Si je ne peux rien dire par rapport à Murakami que je n'ai jamais lu, je retrouve quelques ressemblances avec l'univers d'Ogawa, la nébulosité, l'étrangeté de ses histoires, les thèmes abordés.
Deux histoires ont pour moi un écho plus fort que les autres. La première, Un air nouveau, est une belle et triste histoire de musique, de passion et de plaisir caché. Ajima-sensei a prit sa retraite et enseigne maintenant la gymnastique chinoise. Un soir de tempête où aucun de ses élèves ne se présente au cours, il découvre un orgue dans un coin. C'est son plaisir caché. Un orgue qui change son monde et donne un sens à sa vie. La beauté de ce texte est magnifique, sa fin plutôt triste.
La seconde histoire qui m'a particulièrement touchée est la toute dernière, Le promeneur. Cette histoire en trois parties aborde les thèmes de la méditation, de la nature, mais aussi d'un grand drame. Le tout parallèlement au récit de la vie du personnage principal, un moine bouddhiste exilé au Québec. C'est une nouvelle (ou plutôt une novella dans ce cas-ci) remplie d'humanité. Les autres nouvelles sont intéressantes, originales et étranges, mais n'ont, pour moi, pas la force et la beauté d'Un air nouveau et du Promeneur.
Un auteur que je découvre tout juste. Je suis heureuse d'apprendre qu'il a quelques livres à son actifs, livres que je me ferai un plaisir de lire au fil du temps.
Quelques extraits:
"En dépit de ses soixante-six ans, Ajima-sensei n'avait jamais connu une telle température au Kyushu. Les habitants de la préfecture de Kagoshima avaient été aussi pris de court qu'un maître de thé laissant tomber sa tasse préférée. Déjà, à l'heure de la sortie des classes, d'intimidantes bourrasques s'étaient levées et, d'un lot de pluie arrachée au ciel noir, fouettaient le visage des écolières en fuite. Les uns avaient trouvé refuge chez des amis, beaucoup, chez des inconnus." p.15
"Lorsqu'il jouait, il se sentait revivre. Non pas qu'il eût ressenti de la hargne à l'égard de la vie elle-même, seulement il trouvait la sienne ennuyante. Le grand ennui apprivoise insidieusement l'homme. D'abord l'esprit, ensuite le corps, par moments seulement. Et puis un jour on se réveille, et il est là, simplement. Il est là chez soi, bien installé comme dans un salon à l'occidentale. L'ennui est un vieux copain à qui on a offert un scoth on the rocks après une soirée de poker, et qui depuis refuse de partir. Mais la première note avait cet effet magique: le son s'élevait, et de ses grands bras escortait le vil ennui jusqu'à la sortie." p.20
En complément:
Le site web de l'auteur, Vincent Thibault.