...Une fois franchie l'enceinte toujours interdite car toujours militaire, on reste ahuri. Le passage de la ville-labyrinthe trop pleine à la forteresse vide, est percutant. Comment croire à cette cité morte ancrée dans la cité des chimères ? Les yeux doivent s'habituer comme lorsque l'on passe des ténèbres à la clarté. Ce qui semble alors banal, redevient peu à peu stupéfiant. L'immensité même rétrécit. Le silence s'habille. Venise, un instant évanouie, ressurgit. D'abord le grand bassin. Immobile. Il tend son miroir de mercure à l'imposante grue hydraulique du XIXe siècle, pleurant des larmes de rouille sur son piédestal en marbre d'Istrie. Un pourtour d'autres vestiges festonne les reflets de l'eau. Des cathédrales aquatiques s'embourbent dans leur vase. Des épaves noircissent à contre-jour sur fond de campaniles de carte postale. Des cales sèches au toit éventré élèvent vers le ciel indifférent leurs colonnes blanches, trapues, dévorées par le lierre et les herbes folles. Un frisson romantique court d'arcades en arcs murés, de portiques en fenêtres moirées et brisées. Des ponts suspendus embrassent leur image, emprissonnant l'eau verte...[extraits d'un reportage et texte Elisabeth Vedrenne. La forteresses du Vide].
Darsena grande
Publié le 01 octobre 2010 par Venetiamicio...Une fois franchie l'enceinte toujours interdite car toujours militaire, on reste ahuri. Le passage de la ville-labyrinthe trop pleine à la forteresse vide, est percutant. Comment croire à cette cité morte ancrée dans la cité des chimères ? Les yeux doivent s'habituer comme lorsque l'on passe des ténèbres à la clarté. Ce qui semble alors banal, redevient peu à peu stupéfiant. L'immensité même rétrécit. Le silence s'habille. Venise, un instant évanouie, ressurgit. D'abord le grand bassin. Immobile. Il tend son miroir de mercure à l'imposante grue hydraulique du XIXe siècle, pleurant des larmes de rouille sur son piédestal en marbre d'Istrie. Un pourtour d'autres vestiges festonne les reflets de l'eau. Des cathédrales aquatiques s'embourbent dans leur vase. Des épaves noircissent à contre-jour sur fond de campaniles de carte postale. Des cales sèches au toit éventré élèvent vers le ciel indifférent leurs colonnes blanches, trapues, dévorées par le lierre et les herbes folles. Un frisson romantique court d'arcades en arcs murés, de portiques en fenêtres moirées et brisées. Des ponts suspendus embrassent leur image, emprissonnant l'eau verte...[extraits d'un reportage et texte Elisabeth Vedrenne. La forteresses du Vide].