L’automne arrive et il fait gris. C’est le moment d’aller au Père-Lachaise.
C’est un cimetière très gai. Très peu d’enterrements. Beaucoup de passants. Des badauds. Des touristes égarés, une carte à la main.
En automne, sous leur plafond de pierre, les morts voient défiler des imperméables et des dessous de parapluies. Quand vient l’été, ils voient sous les jupes des filles des dessous affolants. De mon vivant j’ai détesté l’automne. Quand je serai mort, je préférerai l’été.
Je marche d’un bon pas dans la région de Chopin. Chopin est mon phare. Ma balise. J’aurai trouvé quand j’aurai trouvé Chopin. Un couple allemand et mélomane me dit que c’est là, juste là, à quelques pas. Alors j’avance et voilà Chopin. Je me retourne, je regarde. Je viens et je reviens. Chopin. Petrucciani. Je suis bien là c’est bien ici. Mais où mon Dieu ? Ne me tripote pas ! C’est pas le moment.
Et c’est quand Dieu cesse de me peloter que mon regard tombe sur une rambarde noire en fer forgé. Un balcon sans balcon. Une plaque en cuivre et un rosier. Alors et sans prévenir, deux larmes s’installent sur le bout de mon nez. J’en suis le premier étonné. Je baisse la tête. Il y a tous ces gens qui visitent Chopin et moi, j’ai l’air d’un con ma mère, devant ma barrière et son rosier.
J’ai baissé la tête et j’ai pleuré. Juste un petit coup. Heureusement, il pleuvait.