Aimez-vous Dürrenmatt ? Pour ma part, j'ai adoré l'ironie féroce et la gaieté baroque de la Visite de la Vieille Dame.
J'ai donc découvert avec beaucoup d'intérêt un court roman policier de 1952 (traduit en français en 1961), Le Juge et son bourreau.
Dans un coin perdu du Jura suisse, un flic modèle est assassiné ; un vieux commissaire, très malade, enquête, aidé d'un jeune collègue plein d'ambition...
Dürrenmatt joue avec les conventions du roman policier : le flic de base qui découvre le cadavre effondré sur son volant n'a rien de plus pressé que de le pousser à la place passager et d'amener la voiture au commissariat le plus proche... sans que cela soulève beaucoup de protestations !
Par ailleurs, l'on apprend que la victime enquêtait, pour son compte et sous un faux nom, sur un notable du lieu plus ou moins barbouze, et qui se révèle au fil des pages comme une sorte de Fantômas, poursuivi par le vieux commissaire depuis un pari de leur commune jeunesse ; et finalement, le vieux policier mourant manipule tout le monde, y compris son jeune adjoint, et finit par le faire exécuter pour le seul crime qu'il n'ait pas commis : celui du policier...
Mais peut-on vivre encore, lorsque l'on a exécuté son plus fidèle ennemi, et avec lui sa raison de vivre ?
Le roman est distrayant, et suscite un sourire désenchanté sur le bien, le mal, la justice, la mort... L'on y retrouve un peu de l'humour noir de la "Vieille Dame"...