Quelle angoisse dans un cœur simple.
Les oies mouraient dans le vent épais.
Sans branches les buissons semblaient humbles.
Les ponts indécents hors fleuve se suspendaient.
Alors la mer s’est éteinte.
Et je suis
Resté sans univers,
Comme une huile sainte.
•
Les hommes qui hantent les rêves,
Les arbres qui n’ont pas sommeil,
Les fleuves qui ragent et ragent,
Les mains dont on tombe amoureux.
Ah, dévaler boule de feu,
Ou vers la trouée dans la glace.
Ou comme un choc de trains
Mourir oiseau contre un oiseau
1942
•
Dans un instant comme celui-là
Versé le sang de Ludmila
L’esprit du poète pétrifié
La nature occise enterrée
Clouée sous sa planche oubliée
Par des pieds pesants piétinée
Aux fenêtres la nostalgie
Et l’âme dans la neige enfouie
Par la tempête est balayée
1942
•
Un flot aérien dans les oreilles,
Une lune froide au fond de l’âme
Je fusille la folie. Je suis mon propre échec
Et mat. Je suis muet. Je ne suis plus
Rien et ne cours plus vers rien.
Je ne suis plus personne et ne me hâte vers personne
Un flot aérien dans la bouche,
Une lune froide au fond des ténèbres.
Une jambe à l’écart, un bras dans le fossé,
Les yeux tombés de leurs orbites,
Un doigt oublié dans quelque hôpital
Et une lune vaine au fond des ténèbres.
juillet 1942
Guennadi Gor, Blocus, traduction et présentation d’Henri Abril, Circé, 2010, pp. 7, 41, 107 et 183
bio-bibliographie de Guennadi Gor
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