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Anthologie permanente : Guennadi Gor

Par Florence Trocmé

Quelle angoisse dans un cœur simple. 
Les oies mouraient dans le vent épais. 
Sans branches les buissons semblaient humbles. 
Les ponts indécents hors fleuve se suspendaient. 
Alors la mer s’est éteinte. 
Et je suis 
Resté sans univers, 
Comme une huile sainte. 
 
• 
 
Les hommes qui hantent les rêves, 
Les arbres qui n’ont pas sommeil, 
Les fleuves qui ragent et ragent, 
Les mains dont on tombe amoureux. 
Ah, dévaler boule de feu, 
Ou vers la trouée dans la glace. 
Ou comme un choc de trains 
Mourir oiseau contre un oiseau 
 
1942 
 
• 
 
Dans un instant comme celui-là 
Versé le sang de Ludmila 
L’esprit du poète pétrifié 
La nature occise enterrée 
Clouée sous sa planche oubliée 
Par des pieds pesants piétinée 
Aux fenêtres la nostalgie 
Et l’âme dans la neige enfouie 
Par la tempête est balayée 
 
1942 
 
• 
 
Un flot aérien dans les oreilles, 
Une lune froide au fond de l’âme 
Je fusille la folie. Je suis mon propre échec 
Et mat. Je suis muet. Je ne suis plus 
Rien et ne cours plus vers rien. 
Je ne suis plus personne et ne me hâte vers personne 
Un flot aérien dans la bouche,  
Une lune froide au fond des ténèbres. 
Une jambe à l’écart, un bras dans le fossé, 
Les yeux tombés de leurs orbites, 
Un doigt oublié dans quelque hôpital 
Et une lune vaine au fond des ténèbres. 
 
juillet 1942 
 
 
Guennadi Gor, Blocus, traduction et présentation d’Henri Abril, Circé, 2010, pp. 7, 41, 107 et 183 
 
bio-bibliographie de Guennadi Gor 
 
 
 
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