Pourquoi m'extrais-tu de mon petit lit cendreux? De l'armoire moisie de ma vie? De mes miroirs ternis? De ma lune blafarde? De mes veillées esseulée? De mes vêtements à l'odeur de naphtaline? De mon paisible ennui?... Où m’emmènes-tu? jusqu'où se répandra ton feu dans mes plaines arides? combien d’îles oubliées engloutira ton déluge?.. En serait-il ainsi?.. Deux vagues à toi me transportent, me brisent deux cotes. Tu me bois. Tu me noies. Tu allumes mes bougies en usant de ton emphase. Tu me fais voir trente-six chandelles puis tu m'embrases. Et tu m'abandonnes dans mon chemin vers toi, pile-poil là où la route bitumée de l'amertume scinde le sentier enchanté de l'extase.
Et je cours et je ne cesse de courir. Je fuis la douleur qui longe mes nuits... Approche un brin, veux-tu? Approche-toi donc. Approche-toi bien et disparais un temps. Approche toi un peu et disparais autant. Viens donc. Viens. Ne t’arrête point... Je t'en supplie... Rien ne m'est plus pénible que l'inertie... Et je me surprends à chérir la distance qui me sépare de toi, quand je me languis. Je me plais à enlacer ce rayon étincelant qui illumine l'ardeur de l'abeille et la rose qui flue. Je me mets à aspirer à un monde où les routes seraient plus courtes et où les voyages seraient plus longs. Et je pense que je t'aime et je ne saurais peindre ma faim. Et je pense que je t'aime.. Qu'il soit maudit, ce sentiment...
J'ai peur pour ce coeur qui se tord et j'ai peur de choir quand mon désir t’atteint. Toi qui crées les rêves et les tues alors qu'à peine ont-ils pris forme.. à peine ai-je appris ton nom.. Et je frotte mes plaies du bout de ton mutisme et de l'orage sous-jacent. Et meurent mes mots pour que naisse, au creux de tes paumes, l'expression... Tout m’écorche sur ma route vers toi.. Sur ma route vers la mer par voie d'air, m’écorche l'aile d'un papillon...
Ah si seulement je ne t'aimais point...