Les chômeurs payent les retraités : il va falloir plus de chômeurs !

Publié le 29 septembre 2010 par Copeau @Contrepoints

C’est officiel ! Papy René a piqué dans la boîte de biscottes et c’est Dédé La Débrouille qui devra se serrer la ceinture. Autrement dit, il devient évident que ce sont les chômeurs qui vont trinquer les premiers à la santé des retraités. La bataille des générations vient de commencer et ça va se chamailler sévère.

D’un côté, donc, l’armée des retraités, toujours plus grosse. De l’autre, l’armée des chômeurs, elle aussi en pleine turgescence. Pour payer les pensions des premiers, la réformichette proposée pour rire par le gouvernement repousse l’âge de la retraite. Et comme l’ensemble de l’appareil étatique s’est tendu comme un seul homme pour que les préretraites et autres départs anticipés permettent aux jeunes générations de venir remplacer ceux qui allaient partir, histoire de diminuer le chômage – hi hi hi -, le pays s’est coulé dans cette douce habitude qu’après 58 ans, point de salut et par ici le chômage en attendant la retraite.

Ne cherchez pas la logique, il faut avoir fait l’ENA pour comprendre. Minimum.

Le souci, lorsqu’on dépasse un peu les bornes des limites des différentes cautères sociales finement ciselées aux cours des années dans la laine brute du moutontribuable, c’est qu’on finit par ne plus arriver à joindre les deux, pardon trois, pardon dix-huit bouts et qu’apparaissent des trous, de plus en plus gros, véritable mitage des avantages sociaux que le Reste Du Monde, ébahi, ne nous envie qu’assez modérément.

Zut et zut, en voulant combler le trou des retraites, on a agrandi celui du chômage.

Les premiers calculs, sortis tous droits des magnifiques tubulures chromées de Bercy manipulées par nos experts en … tubulures chromées, sont édifiants et montrent que le trou devrait avoisiner les 420 à 480 millions d’euros d’ici 2016 selon qu’on pousse ou pas ce petit bouton rouge, là, et qu’on fait fromager de façon constante les spandrels bitumeux qui, comme chacun sait, permettent d’ajouter une finesse supplémentaire dans le paramétrage initial qu’on introduit ici et là. Non, ne touchez pas, c’est délicat à régler, merci.

Evidemment, les « partenaires sociaux » (les branleurs de droite et de gauche qui se sucrent sur le dos des salariés en prétendant représenter autre chose que les 6 ou 7% de gogos qu’ils ratissent honteusement) se sont vite rassemblés pour en discuter et convenir que tout ceci méritait qu’on y réfléchisse profondément.

D’un côté, les syndicats (les branleurs socialistes de gauche) ont toujours souligné, entre deux prises rapides et précises de merguez cuites à point, qu’il ne servait à rien de retarder l’âge légal de départ à la retraite si les vieux les seniors n’arrivaient pas à conserver leur travail jusqu’à cet âge.

De l’autre, le MEDEF (les branleurs socialistes de droite) s’est empressé de dire que mais non mais non, puisqu’on recule l’âge de départ, les entreprises vont conserver les vieux les seniors plus longtemps, ça fera moins de chômeurs et tout ceci passera comme une lettre à Fedex (la Poste étant en dérangement).

Mmmh.

Evidemment, le paramètre Qui Paye Tout Ca Au Final ne rentre pas dans l’équation. En gros, deux attitudes existent : l’une consiste à vouloir camper fermement sur ses positions, en serrant les fesses et en fermant les yeux (ou l’inverse, peu importe). C’est réputé faire disparaître les problèmes. Ou filer une occlusion intestinale, ce qui tombe bien puisqu’il s’agit surtout de ne rien lâcher. Jamais. A personne.

L’autre consiste à parier sur une amélioration magique de la conjoncture, le comportement idoine des créateurs de richesse et une bonne entente de la population qui va aller, youkaïdi, youkaïda, sans trop se poser de question, dans la bonne direction, acheter français, faire de la qualité, rouler bio et manger-bouger bien comme il faut entre les repas.

En réalité, la seule attitude qui vaille, ici, est de noter que seuls ceux qui travaillent dans le secteur marchand abondent réellement aux tonneaux percés des Danaïdes qu’on tente ainsi de remplir. Chaque emploi dont la source initiale est un impôt ou un prélèvement ne génère en lui-même pas de richesse directe (si ce n’était pas le cas, le solde du budget ne pourrait être déficitaire plus de trente ans d’affilée).

Or, tout le schéma de financement des retraites repose sur deux principes : que les entrants – qui payent – soient plus nombreux que les sortants – qui touchent – et que la croissance permette de huiler généreusement tout ça en augmentant harmonieusement le niveau de vie de tout le monde. Avec une croissance rachitique et une natalité insuffisante, c’est la déroute. Pire, sans cette croissance, le chômage grimpe. Et un chômeur, question cotisation retraite, c’est comme un fonctionnaire…

La conclusion est évidente (et elle nécessite aussi d’avoir fait l’ENA) : si les chômeurs doivent payer pour les retraités, il va nous falloir plus de chômeurs ! On comprend dès lors pourquoi tout est fait pour en créer.

Tout ceci semble, de loin, s’apparenter pour nos politiciens à déshabiller intégralement Paul pour laisser Pierre en slip, et conserver discrètement par devers soi les mitaines et l’anorak alors que la bise se lève dru. On comprend que la solution ne viendra pas réellement des arrangements quasi-comiques des pièces d’étoffe pour cacher la misère : les trous sont énormes et seul GoogleMap rendrait justice à leurs dimensions.

Le libéral regarde tout ceci d’un oeil morne. S’il est à la retraite, il sait qu’il va voir son pouvoir d’achat diminuer un grand coup. S’il est au chômage, il sait que son pouvoir d’achat va diminuer. Un grand coup aussi. Et s’il est entrepreneur, salarié ou indépendant, il sait que de toute façon, toutes ces conneries, c’est pas ça qui va augmenter son pouvoir d’achat qui va, en réalité, diminuer, un grand coup.

Il se dit aussi que si tout ce petit monde avait réellement quelque chose à dire, ou quelque chose de pertinent à faire autre que sauver ses miches, cela aurait été fait depuis longtemps.

Comme ce n’est pas le cas, une seule conclusion vient à l’esprit :

ce pays est foutu.